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Qu’est-ce que le droit foncier et quel est l’intérêt ?

Par dissertation   •  8 Juillet 2013  •  Dissertation  •  1 176 Mots (5 Pages)  •  24 467 Vues

DROIT FONCIER

Introduction

C’est l’étude des règles qui régissent la gestion des terres. De façon générale, il s’agit des terres urbaines ou rurales.

Il existe deux catégories de droit foncier.

- Le droit immobilier (urbain)

- Droit foncier rural (rural)

C’est le droit foncier qui fera l’objet de notre étude.

Il existe des règles communes à ses deux branches du droit foncier, c’est le décret de la loi de 1932 sur le cadastre et la conservation foncière et l’immatriculation des terres.

Aussi il y a un décret du 19 février 1971 sur les procédures foncières et urbaines.

Il y a une loi spécifique propre au droit foncier rural. C’est la loi 98-750 du 23 décembre 1998 relative au domaine foncier rural.

Chapitre 1 : Définition et composition du domaine foncier rural

Section 1- Définition

Le droit foncier rural est composé par l’ensemble des terres mises en valeur ou non et quelle que soit la nature de la mise en valeur.

Le domaine foncier rural constitue un patrimoine national auquel toute personne physique ou morale peut accéder.

Toutefois seul l’Etat, les collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admis à en être propriétaires.

Les personnes morales privées sont exclues.

Section 2- La composition du domaine foncier rural

Le domaine foncier rural est à la fois au point de vue de sa situation :

- Hors du domaine public

- Hors des zones d’aménagement différées officiellement constituées, et

- Hors du domaine forestier classé

Le domaine foncier rural est composé de deux éléments : Un élément permanent et un élément transitoire.

L’élément permanent se compose :

- Des terres, propriété de l’Etat,

- Des terres propriété des collectivités publiques et des particuliers,

- Des terres sans maitre

L’élément transitoire se compose :

- Des terres du domaine coutumier,

- Des terres du domaine concédé par l’état à des collectivités publiques et des particuliers

Le domaine foncier rural coutumier est constitué par l’ensemble des terres sur lesquelles s’exercent :

- Des droits coutumiers conforment aux traditions.

- Des droits coutumiers cédés à des tiers

Chapitre 2 : Propriété, concession et transmission du domaine foncier rural

Section 1- La propriété du domaine foncier rural

La propriété d’une terre du domaine foncier rural est établie à partir de l’immatriculation de cette terre au registre foncier ouvert à cet effet par l’Administration et en ce qui concerne les terres du domaine coutumier par le Certificat Foncier.

A- L’immatriculation des terres du domaine foncier rural

Le détenteur légal d’un Certificat Foncier doit requérir l’immatriculation de la terre correspondante dans un délai de trois ans à compter de la date d’acquisition du Certification Foncier donnée par le préfet.

En cas de cession ou de morcellement, ce délai court à compter de la signature du certificat initial.

La demande d’immatriculation est formulée par le requérant et remise au directeur départemental de l’agriculture.

Cette requête est ensuite adressée au préfet du département par le directeur départemental de l’agriculture.

Le préfet la transmet ensuite au ministre de l’agriculture

Celui-ci contrôle les pièces du dossier et conserve à sa transmission au conservateur de la propriété foncière.

L’immatriculation est effectuée par ce dernier dans un délai maximal de trois mois à compter de la réception de la requête.

Les frais d’immatriculation sont à la charge du requérant ou du demandeur.

Ces frais sont calculés selon des barèmes établis par arrêtes conjoint des ministres de l’économie et des finances et de l’agriculture.

Aucune cession de tout ou partie du bien foncier n’est autorisé au cours de la procédure d’immatriculation.

L’immatriculation

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Un droit à inventer

Ce livre est recensé par

La maîtrise foncière environnementale

Un outil de gestion de l'environnement

Plan détaillé

Texte intégral.

1 La logique de l’appropriation des espaces, de quelque nature qu’elle soit, définit un rapport aux choses et une forme de gestion exprimant une conception du monde et de son devenir. Or celle-ci n’est pas universelle dans les sociétés humaines. L’impossible généralisation de la propriété foncière dans le monde rural africain en est une preuve et conduit à la nécessité de repenser le rapport juridique des sociétés à leur environnement. Dès lors, nous proposons de raisonner différemment, en partant des réalités locales pour rejoindre les préoccupations internationales d’une patrimonialité environnementale.

Le passage à la propriété foncière n’est en rien inéluctable. Il n’est que le fruit d’une évolution spécifique, qu’on ne peut assimiler à un évolutionnisme universel

2 La pluri-activité de l’espace oblige à une gestion organisée, voire coordonnée, des différents acteurs locaux vis-à-vis de l’environnement. La législation malienne a connu deux périodes de gestion de l’environnement : d’abord étatique, puis décentralisée au moyen d’une organisation organique et fonctionnelle rationalisant la gestion de rapports d’usage et de protection du milieu naturel. Pourtant, on peut s’interroger et démontrer l’incompatibilité d’un régime qui transforme toute chose en bien avec un régime qui repose sur une représentation endogène de l’environnement dans laquelle la dépendance de l’homme à son milieu intègre la dynamique sociale. En effet, « les représentations locales de l’environnement en Afrique [...] se réfèrent à la gestion des processus naturels. Mais les idées locales relatives à la “nature” intègrent des problèmes humains et sociaux qui rendent les distinctions occidentales entre “nature” et “culture” inappropriées pour comprendre les conceptions africaines des relations entre les hommes et l’environnement » ( Fairhead et Leach , 1994 : 24).

3 Le passage à la propriété foncière n’est en rien inéluctable. Il n’est que le fruit d’une évolution spécifique, qu’on ne peut assimiler à un évolutionnisme universel. Il ne constitue donc pas un modèle, mais un cas de figure étranger au Sahel rural, qui méconnaît la propriété foncière et la « marchandisation » de la terre. Le régime de la propriété foncière pose également le problème du passage d’une société lignagère à une société marchande (d’économie capitaliste). Ces réflexions amènent à réinventer un type de rapport juridique des sociétés à leur environnement qui va s’inscrire dans le régime juridique des rapports fonciers.

4 La propriété privée est souvent présentée comme un garant de la protection de l’environnement. En effet, le propriétaire du lieu a directement et personnellement intérêt à la conservation de son fonds. Cependant, il peut aussi le délaisser (laisser agir l’érosion, ne pas surveiller...) ou y exercer des actions destructrices de l’environnement, par exemple en déboisant, en polluant le milieu, ou par la réalisation « d’aménagements » de drainage, la construction de digues, etc.

5 Cependant, la propriété privée est considérée par tout un courant de pensée, exprimé notamment par Max Falque, comme particulièrement protectrice et dotée de nombreuses vertus, tant que le propriétaire opte pour une attitude patrimoniale... Pour cet auteur, l’acquisition en toute propriété est « l’outil par excellence de la protection de l’environnement partout où le pouvoir réglementaire s’avère inefficace. La possession d’espaces par la puissance publique ou un conservatoire privé, si elle est assortie d’une garantie de non-modification de l’utilisation du sol, est certainement très efficace à long terme mais ne règle pas ipso facto le délicat problème de la gestion environnementale. Elle doit donc être utilisée comme le dernier recours, l' ultima ratio, après qu’aient été examinées toutes les autres solutions moins coûteuses, plus efficaces ou socialement plus acceptables » ( Falque , 1996 : 6).

6 Dans un régime de propriété foncière, les personnes publiques disposent de la possibilité d’acquisition du fonds, en usant éventuellement de la procédure d’expropriation ou d’un droit de préemption. La propriété publique n’offre cependant pas toujours les garanties d’une gestion efficace, ni d’une réelle protection. Les pouvoirs publics disposent aussi de la capacité de réglementer. Le pouvoir réglementaire impose des restrictions au propriétaire du fonds qui voit ses prérogatives, pourtant absolues, disparaître peu à peu sous le poids croissant de décisions limitatives.

7 L’appropriation publique de l’environnement, comme c’est le cas au Mali, offre-t-elle de meilleures garanties ? Son objectif étant de satisfaire non pas un intérêt privé mais des besoins d’intérêt général, la « publicisation » des milieux est un instrument de gestion placé aux mains de la puissance publique qui peut se révéler efficace au regard de son régime dérogatoire au droit commun. Mais en Afrique, l’État propriétaire de l’ensemble des espaces naturels en est également le gestionnaire et le policier. Seule la jouissance appartient aux populations. Cette situation charge l’État d’une fonction de gestion qu’il n’a jamais pu raisonnablement tenir et qu’il ne peut pas toujours assumer (cf. supra ).

8 Depuis la colonisation, les droits locaux n’ont certes pas été totalement ignorés, mais ils ont été largement déconsidérés. Le droit endogène a été intégré dans la législation d’abord coloniale puis étatique sous l’appellation de « droit coutumier » s’exprimant en « droits d’usage » relatifs à l’exploitation des ressources naturelles renouvelables. En effet, le décret du 24 juillet 1906 reconnaissait des « droits d’usage coutumiers ». Par la suite, les législations sur la chasse, la pêche et les forêts ont toujours assimilé les droits traditionnels aux droits d’usage. Quant à la législation foncière, celle-ci est bien souvent constitutive d’un bel instrument juridique que la pratique rend peu effectif.

9 Le premier décret sur le foncier, qui date du 20 juillet 1900, incorporait dans le domaine éminent de l’État « toutes les terres vacantes et sans maîtres » et tous les « territoires résultant de la conquête » ainsi que ceux qui résultent d’accords signés avec les indigènes, mais sans faire aucunement mention de droits coutumiers. Le décret du 23 octobre 1904 reconnaissait les « terres coutumières » mais celui du 15 novembre 1935 l’entache d’une limitation, par l’introduction de la notion d’absence d’exploitation sur une durée de dix ans, qui a pour effet le transfert de la terre dans le domaine de l’État. La naissance de la procédure de constatation corrobore une véritable reconnaissance des droits locaux. Son origine remonte à l’arrêté Faidherbe du 11 mars 1865, avec la sacro-sainte notion de mise en valeur, qui est le signe d’une emprise évidente et permanente. Tout d’abord, le droit oral d’origine coutumière fait l’objet de transcriptions (décret du 2 mai 1906), à la suite d’une déclaration publique d’accords verbaux, avant de commencer à faire l’objet d’une constatation (par le décret du 8 octobre 1925). L’objectif fondamental avoué par le colonisateur consistait à opérer la mutation des droits traditionnels en droits de propriété. Mais le possesseur traditionnel subissait le fardeau de la preuve du contraire, c’est-à-dire qu'il devait faire la démonstration que la terre n’était pas vacante et sans maître (et exploitée). Cette présomption de propriété de l’État sur les terres vacantes et sans maître fut abandonnée dans le décret du 20 mai 1955 (décret d’application du 10 juillet 1956). Ce dernier reconnaissait expressément les droits coutumiers, dont le constat était dressé sur un livre foncier. L’État devait immatriculer tout son domaine et avait au préalable la charge de la preuve d’absence de droits coutumiers.

« Nous pensons qu’élaborer un Code domanial et foncier en ignorant ou méprisant complètement et totalement tous les droits traditionnels de notre pays serait une offense grave à notre passé historique et à notre culture. » (Daouda Cissé, in INFJ, 1994 : 30)

10 Après l’indépendance du Mali, la loi du 4 février 1982 (n o 82-122) ne fait aucune référence aux droits traditionnels qui seront reconnus, mais sans valeur, dans le Code domanial et foncier de 1986. Cependant, quelle que soit la construction juridique adoptée, tout artifice succombe à la réalité locale, ce que confirme un magistrat à la Direction nationale des affaires judiciaires et du sceau : « Malgré ce silence, le constat de fait sur le terrain a prouvé la persistance de phénomènes incontournables dans le monde rural qui ne s’accommodent pas facilement avec la vision de propriété de la terre découlant du Code civil. Les droits coutumiers ont survécu gaillardement et sont demeurés le vrai droit applicable dans le milieu rural. C’est pourquoi en 1986, le Code domanial n’eut aucune pudeur pour reconnaître la vérité du monde rural et essayer de gérer cette évidence qu’avait occultée le texte de 1982 » (Daouda Cissé in INFJ, 1994 : 28).

11 En 1986, le droit étatique offre-il une place suffisante aux droits endogènes pour rendre le texte applicable ? La réponse est négative et confirmée par les juristes maliens eux-mêmes : « Le Code domanial et foncier est plus un instrument de développement économique que juridique ; or la valeur d’une règle de droit dépend de sa concordance avec les situations concrètes qu’elle est appelée à régir ; elle peut répondre à un besoin de changement mais ne peut le créer » (Tignougou Sanogo in INFJ, 1994 : 22). Ce mépris des réalités sociales se révèle d’autant plus grand qu’il signe le rejet d’une culture révélatrice de l’identité endogène, alors qu’il est clair qu’elles expriment un droit inabrogeable : « Nous pensons qu’élaborer un Code domanial et foncier en ignorant ou méprisant complètement et totalement tous les droits traditionnels de notre pays serait une offense grave à notre passé historique et à notre culture. En plus, en prenant en considération la vivacité avec laquelle ces droits traditionnels ont résisté au droit colonial et à l’actuel Code domanial et foncier, il serait Illusoire de les écarter totalement » (Daouda Cissé in INFJ, 1994 : 30).

12 La remise en cause du droit étatique ne conteste pas - ou seulement de façon timide - l’institution qu’est la, propriété. Les recommandations du Séminaire national (au Mali) sur les litiges fonciers le démontrent en demandant plus de considération des droits traditionnels. Elles vont même jusqu'à prôner « l’inventaire des coutumes en vue de leur codification » et affirment que la fonction de maître des pâturages est une «institution essentielle » qui doit être maintenue au nom du système foncier traditionnel.

13 C’est la conception propriétariste, fer de lance du droit étatique, qui devrait être repensée. Il est vrai que l’entreprise n’est pas mince, surtout dans les esprits persuadés du caractère universel et inéluctable du régime de la propriété du fonds. La réalité foncière montre que l’adoption du modèle de la propriété n’est pas inéluctable au Sahel. La vision réifiante du monde transformant toute chose en bien a désespérément tenté de s’imposer dans un monde rural possédant sa propre dynamique foncière. Après trente-cinq années d’indépendance, le modèle de la propriété en lui-même n’est pas remis en cause par l’élite nationale, bien que son inadaptation et son inapplicabilité soient soulignées. Mais une prise de conscience semble émerger sur la scène internationale et une nouvelle tendance apparaît. En effet, selon certaines institutions internationales, « la question est posée de savoir si la généralisation de la propriété privée est une solution, comme cela se fait en ville. De toute manière, le marché de la terre se développe et si l’État laisse faire, les plus gros mangeront les plus petits. Il faudrait donc, si l’État veut garder des petits producteurs, prévoir dans la loi des garde-fous limitant l’accumulation de terres » (Club du Sahel/CILSS/OCDE, 1989 :42). Il semble évident que les risques d’aboutir à une concentration foncière de type latifundia sont grands, avec l’apparition du phénomène de paysans sans terre, qu’aucune loi ne peut éviter.

14 La thèse propriétariste est surtout justifiée par une idée reçue, selon laquelle le titre de propriété, donc la capacité d'aliénation, permet l’accès au crédit puisque la terre monétarisée représente une garantie. Or, on se rend compte que les petits agriculteurs, partout dans le monde, sont extrêmement réticents à l’idée d’hypothéquer leur terre, au risque de la perdre (selon Cleaver et Schreiber , 1994 : 57). Enfin, le second point justifiant lui aussi l’adoption de la propriété réside dans la sécurisation des rapports de l’homme à la terre. Les droits traditionnels n’offriraient pas suffisamment de sécurité juridique et démotiveraient par conséquent tout esprit d’investissement visant notamment à la conservation des sols. Or, l’analyse du parcellaire foncier du village de Wuro Neema a permis de constater que le droit foncier endogène se révélait justement sécurisant. Il est en effet apparu que les champs qui étaient prêtés bénéficiaient globalement dans les mêmes proportions que les champs hérités d’une préparation et d’un entretien, d’une fertilisation et d’aménagements anti-érosifs, ce qui prouverait que les droits d’exploitation délégués ou attribués offrent suffisamment de garantie aux exploitants pour les engager à investir des efforts sur des champs qui ne leur appartiennent pas.

La réflexion sur un foncier de gestion des ressources naturelles et de conservation des écosystèmes signifie repenser les rapports de l’homme avec son milieu, sans forcément les réinventer. En revanche, ce qu’il faut inventer, c’est une construction juridique qui réponde aux défis environnementaux.

15 Toute la réglementation environnementale (forêts, aires protégées, espèces, chasse, pêche) repose sur le régime juridique foncier selon lequel le rapport à l’espace conditionne celui des éléments qu’il contient. Le droit de l’environnement se définit ainsi davantage au travers d’un choix de société que d’une option purement technique. La perspective d’une coviabilité des systèmes sociaux et écologiques nécessite a priori le choix d’un système foncier et c’est à ce dernier d’intégrer les préoccupations environnementales.

16 Les réformes législatives risquent de demeurer inutiles si elles omettent de penser le rapport des hommes aux choses en termes économiques à travers les relations de réciprocité, de redistribution et de marché.

17 La réflexion sur un foncier de gestion des ressources naturelles et de conservation des écosystèmes signifie repenser les rapports de l’homme avec son milieu, sans forcément les réinventer. En revanche, ce qu’il faut inventer, c’est une construction juridique qui réponde aux défis environnementaux auxquels le Sahélien est confronté, tout particulièrement dans le delta intérieur du Niger.

Un mode de lecture des rapports fonciers : approche d'un foncier de l'environnement

18 Quand le droit écrit ne correspond pas aux règles juridiques auxquelles se réfèrent les acteurs, il se trouve exclu du référent juridique en vigueur. Se pose alors la question de savoir comment des textes, même adoptés par un corps législatif, peuvent prétendre « poser » un droit qui nie l’existence d’une juridicité locale. Il semble bien que la norme juridique positive doive émaner d’une légitimité sociale et prendre en compte la pluralité des expressions du droit.

19 La relation d’interdépendance entre le droit et la société conduit à s’interroger à la fois sur l’opportunité et sur l’impact de l’apport d’un droit exogène. Le droit peut-il être cet instrument qui transforme ou bouleverse les comportements sociaux ? Comment une loi peut-elle s’appliquer sans tenir compte des réalités et des diversités locales ? L’origine de la formation du droit répond à ces questions. Actuellement, il ressort que les textes adoptés par le législateur malien amplifient l’insécurité des rapports que les populations rurales entretiennent avec la terre et globalement avec l’ensemble des ressources naturelles renouvelables, du moins tant que la décentralisation n’est pas mise pleinement en application et que le régime foncier n’est pas réformé.

20 La société moderne transforme la plupart des choses en biens monnayables. Mais que deviennent les légitimités locales dans les sociétés qui accordent une importance patrimoniale à la terre, à l’eau et au monde végétal et animal ? Les instances reconnues localement demeurent pourtant incontournables, selon Cheibane Coulibaly, dont « le constat amer montre en effet que les États au Sahel n’ont réellement conçu les autorités locales que comme simple prolongement des administrations centrales. Ils ont le plus souvent dénié toute reconnaissance aux institutions locales qui ne servent pas directement les besoins et les intérêts de l’administration, même dans les cas où ces institutions remplissent un rôle essentiel dans la production et la gestion locale des richesses » ( Coulibaly et Thomson , 1994 : 45).

21 La norme juridique émane des faits sociaux dont elle constitue la codification des pratiques les plus dangereuses. C’est pourquoi la réalité culturelle est une donnée que le droit ne peut occulter, puisqu’il la recouvre. La sociologie du droit souligne, à ce propos, que le droit émane bien des hommes qui le plient à leurs intérêts mais aussi à leur prudence (cf. Carbonnier , 1988). Flexible est le droit soumis à la volonté des hommes, sans quoi le vent continuel de la dynamique sociale ne cesserait de le briser en remettant perpétuellement en cause les « armistices sociaux ».

22 Étrange idée que de vouloir opposer la loi à la coutume. Elle se pose cependant dans le contexte particulier de l’Afrique sahélienne, où l’on se demande s’il ne faudrait pas codifier le droit traditionnel pour l’intégrer dans le droit écrit. Cependant, contrairement à ce qui pourrait être pensé, la rédaction des coutumes ne consiste en aucun cas dans une « photographie » des usages des populations. Les droits traditionnels ne peuvent en effet sortir du processus de la transcription que modifiés, réinterprétés avec des ajouts et des retraits. De plus, cette opération de « transsubstantiation » ( Rouland et al., 1996 : 534) s’avérerait difficilement possible, face à la pluralité juridique et à l’hétérogénéité des normes et règles juridiques caractérisant les différentes zones géographiques.

23 Les projets de codification des coutumes, comme les « coutumiers » de 1939, visent à les apurer de leurs composantes endogènes et donnent lieu à la notion de « droit coutumier », véritable « produit d’une acculturation du droit traditionnel opérée par et pour le colonisateur » ( Rouland et al., 1996 : 511 ; Rouland , 1988 : 364). Le Code domanial et foncier malien de 1986, quant à lui, renvoie à la coutume, sans pour autant la préciser, afin d’éviter le vide juridique ou pour mieux la « purger » (section 7, art. 127 à 134).

24 Il semble plus judicieux de gommer dès maintenant cette idée d’intégration. Mettre fin à la juxtaposition des droits coutumiers et étatiques en réhabilitant les premiers ne doit pas amener « à trouver entre les deux l’illusoire compromis qui résulterait de leur seule adjonction » ( Buttoud , 1995 :195). En fait, le législateur impose les lois d’une société à économie de type occidental à une société patrimoniale. Ainsi, l'incompatibilité persistera tant que le monde rural ne sera pas pris en compte tel qu'il est, dans toutes ses dimensions culturelle, économique et écologique. Il est évident que les droits issus des systèmes juridiques autochtones ne s’harmonisent ni spontanément, ni intégralement avec les institutions étatiques, de telle sorte qu’on est en droit de s’interroger sur les renvois que les législations nationales ou les textes internationaux font aux différentes coutumes, sans définir leur contenu. Et l’on arrive à se demander, tout comme Norbert Rouland, s'il ne s’agit pas finalement d’une vaste illusion ( Rouland et al., 1996 : 464).

25 Il est vrai que la coutume peut être vue sous deux angles différents, dépendants de sa représentation et des mécanismes de son évolution. On peut soit lui trouver une légitimité contemporaine, fondée sur ses capacités d’adaptation, soit lui dénier tout esprit constructif et progressiste, en l’assimilant à un passé révolu ou à une structure figée. La coutume apparaît à la fois décomposée, stratifiée et plurielle : tout dépend du contexte dans lequel elle est saisie et surtout de ce qu'on veut lui faire dire, en raison du fait qu’elle appartient à l’univers des « signifiants flottants » ( Lévi-Strauss , 1958 : 464).

26 La prise en compte des droits traditionnels par l’État devrait se concevoir comme une évidence. L’association de l’oralité et de l’écrit aboutit non pas à une opposition mais à une complémentarité nécessaire au monde rural pour son organisation. Il est vrai que « la majorité de la société est organisée sur la tradition orale et l’erreur que nous a apportée la tradition écrite, c’est d’organiser l’État sur la base de la tradition écrite... Ce sont ceux qui gèrent la tradition écrite qui sont fragilisés et ce sont eux qui parlent de fragilisation » (Boubacar Sada Sy, in Décentralisation, février 1994 : 7).

La nécessité d'une lecture juridique endogène

27 Le besoin d’un droit garantissant la coviabilité à long terme des écosystèmes et des modes d’exploitation se fait actuellement ressentir dans tous les pays du CILSS.

Ce besoin constitue l’une des conclusions de la conférence régionale sur la problématique foncière et la décentralisation qui s’est tenue à Praia (Cap-Vert) du 20 au 24 juin 1994. Quatre principes fondamentaux ont été dégagés de la déclaration de Praia : la reconnaissance de la légitimité des structures locales par les pouvoirs publics ; l’élaboration d’un cadre de définition et de partage des pouvoirs et des compétences entre l’État, les collectivités décentralisées et les organisations volontaires et associatives ; la nécessité de sécuriser les citoyens et de leur redonner confiance, tant à l’égard des institutions publiques que des ONG et des groupements associatifs ; enfin, la mise en place de structures décentralisées.

28 Selon la déclaration de Praia, la résolution de la problématique foncière passe par les structures locales et par une légalisation des pratiques locales. Les conflits pour la gestion et le contrôle des ressources naturelles sont pris en considération par la conférence parce qu’ils risquent de compromettre la paix sociale et le développement.

29 Finalement, la question du droit à appliquer revient toujours, mais cette fois, elle est posée à un niveau international : « L’État a beau dire que la source du droit est la législation officielle, le paysan continuera à se référer à ses propres normes sociales et culturelles. L’intériorisation d’une loi ne se fait pas du jour au lendemain. Bref, les effets d’une nouvelle loi foncière dépendent plus de la motivation des acteurs que des intentions du législateur » (Boubakar Moussa Ba in Cauris dossier, n o 1, décembre 1994 :10). Une nouvelle approche foncière s’impose donc afin de répondre à la gestion viable à long terme des ressources naturelles.

30 La conservation des écosystèmes dépendra de la prise en considération du droit endogène afin d’aboutir davantage à un rapport fondé sur la responsabilité que sur la réglementation, car pour responsabiliser les populations dans la gestion de leur environnement, « il faut leur laisser “faire leur droit” en fonction des besoins de sécurité qu’elles expriment» ( Le Roy , 1990 : 15). Or, jusqu’à présent, les rapports fonciers ont été définis en référence à une logique juridique occidentale. En effet, la terminologie de l’appropriation s’est imposée, sans jamais avoir été remise en cause, ce qui a engendré la certitude que le rapport foncier est un rapport social déterminé par l’appropriation de l’espace.

31 Si, d'un point de vue didactique, le terme d’appropriation signifie « rendre propre à un usage, à une destination », d’un point de vue juridique, il concerne « l’action de s’attribuer la propriété de quelque chose » ou « l’action d’en faire sa propriété ». Par exemple, on approprie un espace à un usage, dans la première assertion, et un espace est approprié, dans le cadre d’une relation d’appartenance, dans la deuxième assertion. Les deux aspects de la définition ont été considérés. Le foncier est d'abord défini comme la reconnaissance collective d'une affectation « d'un espace à un usage particulier, quel que soit cet usage et le degré de réservation [...] Seules peuvent être dites foncières les pratiques sociales d’appropriation qui sont liées à une affectation particulière de l’espace physique » ( Le Roy , 1985 : 3). Cette définition est conforme à la réalité, mais elle reste insuffisante sur le plan juridique et trop générique pour se suffire à elle-même. En introduction à L’appropriation de la terre en Afrique noire (1991), Étienne Le Roy donne deux définitions différentes du terme « appropriation » : la première, africaine selon lui, consiste dans « l’affectation à un usage » et la seconde, celle du Code civil français de 1804, est « l’attribution du droit de disposer ». Plus loin, il avoue cependant « qu’en l’absence du droit de disposer, on ne peut, au moins juridiquement, parler de propriété » ( Le Roy , 1991 : 35). Juridiquement, l’appropriation se définit donc par une attribution exclusive et absolue d’un bien. À ce titre, on ne peut donc pas parler d’appropriation en l’absence de propriété.

Quel droit foncier ?

32 Dans le cadre du développement durable, le droit foncier doit intégrer une dynamique environnementale de gestion des ressources naturelles et de conservation des écosystèmes. Tous les systèmes d’exploitation ou de prélèvement sont pris en compte simultanément dans un rapport d’ensemble qualifié de foncier puisque toutes les ressources sont assises sur un fonds. Ce rattachement exprime un rapport non pas d’accessoire, qui renverrait au régime juridique du sol, mais de dépendance, lié à une vision écologique. Il est ainsi nécessaire d’organiser les différents types de droits dont les hommes disposent sur l’espace et les ressources en structurant et en reconnaissant les systèmes de contrôle, d’accès et d’appropriation qui existent.

33 Le droit foncier est habituellement restreint au seul rapport à la terre, alors que des rapports à l’espace, à la ressource et à l’écosystème sont également en jeu. Une combinaison des droits relatifs à tous ces rapports ne se limite plus à la seule appropriation du fonds. Elle dépasse une conception ruraliste du droit foncier, en lui intégrant une dimension environnementale : modes de régulation, représentations et pratiques des acteurs sur leur milieu.

34 Les rapports fonciers s’inscrivent dans une perspective environnementale. Les hommes, qu’ils soient exploitants ou usagers, dans un contexte agricole, pastoral, halieutique, forestier, cynégétique ou de conservation des écosystèmes, entretiennent des rapports « fonciers environnementaux » dans la gestion de l'exploitation, du prélèvement des ressources naturelles renouvelables et de la préservation de la biodiversité. Le « foncier-environnement » exprime ainsi, à travers les paysages, la relation homme/nature en tant que reflet d’une conception du monde construite au cours du temps.

35 Cette définition ne constitue pas une adaptation du foncier agraire, mais bien la formulation d'une conception environnementale des rapports fonciers. Le Club du Sahel et le CILSS ont déjà redéfini en 1993 le foncier comme étant « constitué à la fois par la terre et les ressources naturelles qui y sont directement attachées et l’ensemble des relations entre individus ou groupes pour l’appropriation et l’utilisation de ces ressources » (cité par Samba Soumaré in Décentralisation, février 1994 : 12). En novembre 1995, Paul Mathieu, dans ses travaux sur la participation des communautés locales aux actions d’environnement, comprend le foncier comme étant « constitué à la fois par la terre et les ressources naturelles qui y sont directement attachées (pâturages, eaux, arbres), et l'ensemble des relations entre individus et groupes pour l’appropriation et l’utilisation de ces ressources » ( Laurent et Mathieu , 1995 a : 46).

36 La réalité foncière s’appréhende localement avant d’être pensée globalement. Toutefois, comme on l’a vu dans le delta intérieur du Niger, où les spécificités locales sont fréquentes, une situation locale n'est pas toujours généralisable.

37 L’étude du leydi Wuro Neema a permis de dégager une structure générale en tenant compte de l’existence de particularismes locaux, voire microlocaux. La dynamique rurale n’est pas immuable mais dépend de facteurs externes qui, ici, sont avant tout climatiques tels que le niveau des crues et la pluviométrie. La situation peut rester stationnaire, s’aggraver ou nettement s’améliorer selon les années. Les rapports fonciers en sont dépendants et la lecture foncière du paysage, reflet de la socialisation du milieu, le rappelle. Une mare qui n’est plus alimentée en eau deviendra rapidement le domaine des agriculteurs marka et redeviendra le royaume des pêcheurs sorogo l’année d’une pluviométrie abondante ou d’une forte crue. Si les éléments climatiques redeviennent favorables, le burgu reprendra sa place, ainsi que le pasteur peul. La physionomie foncière du paysage demeure donc par essence mouvante et dépendante des configurations géo-hydrologiques.

38 Cependant, cette inconstance foncière concerne surtout les espaces naturels. En effet, l’agriculture itinérante a disparu et les finages villageois sont relativement bien ancrés dans la mémoire collective sinon individuelle des sédentaires. Le nomadisme pastoral est remplacé depuis Seku Amadu par une transhumance saisonnière, assise sur un système foncier institutionnalisé. Enfin, les Bozo et les Somono délimitent également leurs zones de pêche en territorialisant de plus en plus l’espace halieutique au détriment des pêcheries traditionnelles (cf. supra).

39 La mise en évidence des superpositions de légitimités qui s’exercent sur le même espace permet de dégager une perspective particulière. En effet, l’espace sahélien, et particulièrement celui du delta intérieur du Niger, fait l’objet d’un faisceau d’intérêts, qui ne sont pas constitutifs de droits de propriétés, mais d’autres types de droits fonciers de nature différente, qui restent à définir.

40 A priori, toute forme de gestion génère un processus dynamique, mais la notion même de gestion ne préjuge pas de sa propre qualité, qui peut être soit positive, soit négative dans ses résultats. La gestion de l’environnement intègre souvent, et ce devrait être toujours, un projet de conservation. Celui-ci ne vise pas à figer un état donné du milieu et des établissements humains, ni à interrompre toute activité et dynamique économique, mais à rendre effective l’approche du développement durable. La gestion patrimoniale de l’environnement se définit par ce principe de durabilité (ou de viabilité pour d’autres) ; elle implique la convergence des objectifs individuels vers une démarche effective prenant en compte les intentions d’ensemble de la communauté.

Une lecture juridique des rapports fonciers environnementaux

41 Il est possible d’envisager une lecture juridique intégrant une série de droits sur l’espace et les ressources renouvelables. Le cas de départ est une situation où le droit qui est exercé est le plus faible, celui de passage, de simple accès. Puis vient le droit de cueillir, de prélever et de ramasser des branches, bois mort, racines, feuilles, fruits sauvages, etc., et de faire pâturer son bétail en passant. L’emprise sur le milieu s’accroît avec son exploitation par le droit de cultiver, celui de faire pâturer ses animaux, le droit de pêcher, le droit de chasser et le droit d’exploiter la forêt sur un espace bien déterminé. Ce droit d’exploiter la terre et ses ressources renouvelables dépend lui-même du contrôle de l’accès à ces espaces de production. Celui qui contrôle l’espace décide qui va pouvoir cultiver, pâturer, pêcher, chasser, exploiter la forêt ou les arbres. Il dispose du droit d’affecter l’espace en question à quelqu’un, qui peut être soit lui-même, soit quelqu’un d’autre par le biais de prêt, de location, d’échange, etc. Celui qui dispose du droit d’affecter la terre à quelqu’un dispose donc inversement du droit d’exclure l’accès à l’exploitation de la parcelle ou du lieu déterminé.

42 Il en ressort quatre types de droits sur la terre et ses ressources renouvelables : le droit de passer, le droit de prélever, le droit d’exploiter et le droit d’exclure. Cependant, le comportement des acteurs va-t-il automatiquement répondre aux attentes d’un essor de la production alimentaire qui ménage une gestion conservatrice du milieu (sol, arbres, eau, etc.) ? On peut souvent en douter. C’est la raison pour laquelle les pôles de décision doivent avoir un rôle, une fonction qui consiste à impulser et à soutenir la dynamique économique et indirectement les processus écologiques en orientant le comportement des acteurs. Ce droit peut être nommé « droit de gestion intentionnelle ». En donnant ce droit à l’État et à ses différents niveaux déconcentrés, ainsi qu’aux collectivités territoriales décentralisées, relayées par les rouages des prises de décision de la société, l’État pourrait devenir le garant du patrimoine foncier et environnemental du pays. Il pourrait en assurer la gestion patrimoniale en répondant aux besoins des générations présentes sans condamner l'existence même des générations futures. Deux objets caractérisent ce droit, le développement économique et la protection de l’environnement.

43 L’idée d’une responsabilité de chaque acteur s’associe à une répartition des droits, en fonction des actions intentionnelles des uns et des autres. Le passage prétendument innocent, le simple prélèvement et l’exploitation relèvent d'une opérationalité qui permet aux acteurs économiques de subvenir à leurs besoins. En dehors de ce rapport utilitaire immédiat, deux types « d’acteurs d'environnement » exercent une gestion intentionnelle : celui qui contrôle l'accès à la ressource et celui qui se donne pour objet la conservation du milieu dans son ensemble.

44 La gestion du milieu est transversale, dans la mesure où elle se répartit entre tous ceux qui interviennent sur lui. Aucun acte sur le milieu n’est innocent. Le simple passage sur une piste génère non seulement une présence humaine mais aussi celle de têtes de bétail (des milliers ou quelques-unes). À différents degrés, l’environnement s'en trouvera affecté, comme l’état des pistes de transhumance et de leurs abords le démontre en exhibant un sol dénudé, laminé et soumis à une forte érosion éolienne et/ou hydrique. La végétation des alentours dans un rayon de vingt à trente mètres se trouve particulièrement rabougrie, sélectionnée (disparition des espèces les plus appétées) et stressée. En ce qui concerne les espèces sauvages nidificatrices et celles qui répugnent au dérangement, les effets se traduisent par la fuite (susceptible de compromettre la reproduction en cours) ou par l’abandon du site (pour les espèces très craintives ou pour les migrateurs qui se nourrissent et se reproduisent dans le secteur).

45 Le prélèvement se confond avec la jouissance de la production naturelle du milieu. Si la quantité des fruits naturels (produits spontanés) prélevée est ponctuellement faible, la régularité de l’action amplifie l’importance de la ponction. La façon de procéder au prélèvement entraîne souvent de lourdes conséquences. Les différents critères de prélèvement sont l’époque (les effets des actes de prédation sont différents en saison humide ou sèche), la répartition (concentration ou dissémination du prélèvement) et la qualité de l’acte, plus ou moins préjudiciable à la régénération (proportion de femelles chassées, nombre d’œufs ramassés, pâturage arbustif trop proche du tronc, taille déséquilibrant l’arbre et étêtage interrompant son développement, etc.). L’intensité de la pression anthropique sur l’écosystème a des conséquences qui dépendent de la fragilité ou de la capacité de réaction du milieu, de sa résilience.

46 À la différence du prélèvement, l’exploitation exerce sur les écosystèmes une pression peut-être moins insidieuse, mais plus brutale et plus importante qui peut aller jusqu'à la transformation complète du milieu. Au plus fort de l’exploitation, l’écosystème subit une mutation orchestrée par l’homme : il est transformé en système de production et atteint un niveau d’artificialisation total. Les pâturages dans le delta intérieur du Niger correspondent en effet à l’écosystème d'une zone humide (plaine inondée, mare). De même, les pêcheries modifient peu le milieu, les petits barrages n’étant pas durables. En revanche, l’agriculture transforme souvent radicalement, par suppression, le biotope forestier, celui de savane ou la zone humide en espace agraire. L’objectif économique de l'exploitation donne lieu à une commercialisation des fruits et produits. Le profit tiré de la vente du burgu, plante aquatique (fourragère pour l’élevage) vendue sur les marchés pour la stabulation urbaine ou villageoise, aboutit à une exploitation excessive et destructrice du biotope concerné.

47 L’exclusion est une attitude d’appropriation de l’accès à des ressources qui sont situées dans un espace défini. Le groupe s’organise par rapport aux autres en se réservant telle ressource de telle zone. Cette attitude qui élimine l’accès libre territorialise inévitablement l’espace. Elle le fait non pas en fonction du fonds, mais de la ressource intéressée. La qualité de membre de la communauté devient la condition d’un droit d’exploitation, voire éventuellement d’un droit de prélèvement.

48 La conservation du milieu consiste à préserver les éléments de la biosphère des effets néfastes des activités humaines par un ensemble de techniques, de mesures, d’actions, de sensibilisations, d'incitations. Elle intègre ainsi toute la réglementation forestière, cynégétique, halieutique et celle des aires protégées. La protection de l’environnement concerne, outre la préservation des biotopes, celle des espèces et particulièrement de leur diversité. Globalement elle se traduit par une conservation de la biodiversité.

Cinq types de droits régulent donc les rapports à l’égard du milieu :
Un droit de passage : il correspond à la circulation et au stationnement ; c'est l’usage d’un espace comme voie d’accès (ex : droit de parcours) avec des arrêts temporaires éventuels (ex : droit de gîte).
Un droit de prélèvement d'une ressource naturelle spontanée ou de résidus de récolte : c’est le droit de ponction réalisée sur le milieu (cueillette, vaine pâture, pâture forestière, chasse et pêche (viatiques), affouage, ébranchage, glanage...).
Un droit d’exploitation correspondant à un faire-valoir de la ressource, dont l’objet est d'en tirer profit au travers d’une production agricole, sylvicole, pastorale, halieutique ou cynégétique. Il donne lieu à une gestion de la ressource sur un court ou moyen terme.
Un droit d’exclusion permettant le contrôle de l’espace qui conduit à l'exclusion et à l'affectation de l’accès à la ressource. Il se traduit ainsi par une gestion de sa régénération sur le long terme.
Un droit de gestion intentionnelle qui comprend à la fois deux objectifs : de protection de l'environnement et de sécurité alimentaire.

49 L’ensemble des droits (de passage, de prélèvement, d’exploitation, d’exclusion et de protection) caractérise le fondement d’un système de responsabilisation concernant chaque acteur vis-à-vis du milieu dans lequel il évolue.

50 L’exploitation du milieu nécessite la disposition d’un droit de culture, de pâture, de coupe, de pêche ou de chasse. Ces droits d’exploitation se trouvent dans les mains de celui qui détient une exclusivité spécialisée sur l’espace. Par exemple, si le lignage ou le ménage possède une exclusivité de type agricole sur un espace défini, le village, quant à lui, peut détenir l’exclusivité du contrôle forestier sur le même espace. C'est ce contrôle de l’espace qui va permettre de disposer de droits d’exploitation du bois.

Figure 5 – De l'espace à la ressource : les niveaux de relation à la ressource avant son appropriation.

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51 L’appropriation de la ressource suit un cheminement qui part du contrôle de l’espace, en tant que milieu qui fait l’objet d’un droit de passage et d’un droit exclusif (spécialisé pour la ressource en question). L’accès même à la ressource en tant qu’élément biotique s’effectue par un droit de prélèvement ou un droit d'exploitation selon la pression exercée sur le milieu. Intervient ensuite l’appropriation de la ressource, c’est-à-dire son appréhension physique en tant que fruit ou produit qui est librement disposé (le fruit est le produit périodique d’une chose tandis que le produit est tout ce qui provient de la chose sans périodicité ou en épuisant la substance).

52 L’appropriation de la ressource par l’homme transite toujours nécessairement par un processus d’inter-relations sur les plans social, juridique et politique et elle ne se résume pas à une relation duelle entre un sujet et un objet de perception ou de représentation. Ainsi, l’appropriation se situe à l’issue d’un processus global et constitue en soi une finalité, donnant lieu à un partage effectif ou non au sein du groupe et à une consommation.

Jacques Weber considère quant à lui l'appropriation comme étant l'élément central du rapport homme/milieu : « Quel que soit le phénomène environnemental, celui-ci renvoie immanquablement à une question d’appropriation, liée à la source ou à la destination du phénomène » ( Weber , 1995 a : 6). Selon lui, l’individu ou le groupe « s’approprie » l’écosystème à partir d’une perception qui consiste à réaliser une appréhension de l’objet en l'intégrant dans son champ socio-cognitif, c’est-à-dire en le faisant sien ( Weber et Reveret , 1993 : 72). Ce type d’approche phénoménologique intègre ainsi l’appropriation symbolique et se définit par un état, le mode d’appropriation, et une dynamique, le processus de décision, car, selon l’auteur, si un mode d’appropriation définit un état du système des relations société/nature, les processus de décision en livrent la dynamique ( Weber , 1995 a : 12).

Une superposition de légitimités

53 Une lecture foncière environnementale replacée dans un contexte particulier fait apparaître une construction qui permet à différents organes de gestion de s’exercer sur un même espace, de façon responsable et légitime. La possibilité d’une telle superposition trouve d’abord son origine dans un schéma illustrant l’articulation des rouages juridiques à partir de la dichotomie entre l’espace et la ressource. Ensuite, les spécificités locales géographiques, hydrologiques et humaines offrent les circonstances de rapports de gestion variés et multiples relevant de la matrice foncière environnementale du delta intérieur du Niger.

54 Si le droit foncier intéresse le sol, le droit foncier environnemental concerne aussi les éléments qui s’y rattachent, la ressource ne pouvant être appréhendée isolément de son support. L’élément naturel en tant que tel ne constitue pas une ressource, il le devient sans qu’il y ait forcément une appréhension physique. La relation entre l’espace et la ressource est essentielle, car le chemin juridique conduisant à la ressource nécessite toujours un droit préalable sur l’espace. Toute forme de prélèvement transite par un accès et toute exploitation d’une ressource par une relation exclusive à l’espace-ressource. Apparaissent alors des droits spécifiques selon qu’il s’agit d’espace ou de ressource. Pour l’espace, le droit est relatif à l’accès ou à l’exclusivité, tandis qu’il sera de prélèvement et d’exploitation pour la ressource avant son appropriation. Le droit sur la ressource implique donc avant tout un droit sur l’espace.

Figure 6 – Les droits liés aux espaces et aux ressources naturelles renouvelables.

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55 Chaque espace réunit un certain nombre d’éléments naturels. Ceux-ci ne deviennent des ressources qu’en entrant dans un processus économique et ils sont alors susceptibles d’une appropriation. Le cas de la récolte agricole ou sylvicole en est un exemple. Produites par le travail de l’homme sur la terre, les ressources agraires et sylvicoles sont par essence appropriées de façon privative et supportent un droit de disposition. Ce droit absolu sur la ressource apparaît moins évident pour les éléments naturels qui ne sont pas issus d’une production humaine, comme l’arbre qui a poussé naturellement dans l'espace agraire (cultivé ou en jachère). Cependant, ici l’homme s’est rendu possesseur de l’espace sur lequel il travaille avec les éléments qu’il comporte, arbres et fruits intéressants (parfois cependant, le régime juridique de l’arbre ne suit pas celui du champ dans lequel il se trouve, mais ce n’est pas le cas dans le delta). L’arbre constitue bien un signe foncier puisque l’emprunteur ne peut jamais en planter de sa propre initiative. En revanche, il peut laisser pousser tout arbre provenant d’une régénération naturelle. L'arbre planté traduirait donc davantage l’idée d’un signe foncier que d’un réel investissement. En effet, l’emprunteur possède l’entière liberté de mettre en valeur la terre, que ce soit au moyen de gros investissements financiers ou par son simple travail. Ce travail peut consister à protéger la terre contre l’érosion éolienne en construisant des diguettes de pierres ou de tiges de mil, à lutter contre le ruissellement et à « récupérer la terre » dont la couche meuble superficielle a été remplacée par une croûte de battance, par la technique du cope (tchopé) consistant à creuser tous les trente centimètres des trous de dix à vingt centimètres de diamètre et de profondeur, que l’on comble ensuite de fumier.

56 En ce qui concerne les ressources animales telles que poisson et gibier (anatidés, limicoles, mammifères aquatiques et terrestres), le droit n’existe que par la capture, « l’occupation ».

57 Le cas de l’herbe mérite d’être précisé. En effet, une des grandes richesses du delta réside dans les immenses bourgoutières essentiellement situées autour du Diaka, ainsi que dans les lacs Débo et Walado et sur leurs pourtours. Là, la ressource pastorale est intrinsèquement liée à l’espace : plaine inondée, mare, lac, dépression, bordure de cours d’eau.

58 Le jowro peut « vendre » l’herbe de son pâturage lignager, tandis qu’en principe, le chef de village doit refuser tout étranger dans le hariima d’accès libre et gratuit pour les animaux des villageois, et spécialement réservé aux vaches laitières. Le maître des pâturages ne possède pas un droit de disposition absolue sur l’herbe, mais un droit exclusif dont il tire profit en monnayant l’accès à la ressource.

La matrice foncière environnementale du delta

59 Le foncier ne peut s’appréhender sous un angle unique parce qu’il s'intègre dans une dynamique d’ensemble et qu’il résulte d’une synergie de conjonctions et de relations. Dans cette optique, les systèmes fonciers se caractérisent par une série de corrélations entre les espaces, les acteurs et les modes de production et d’usage, qui donnent lieu aux droits fonciers environnementaux afférents.

60 Le tableau du système matriciel du régime foncier du delta (tabl. 22) répond à un triple objectif. D’abord, il présente une vue synoptique des situations juridiques rencontrées dans le delta ; ensuite, il permet de lire le paysage foncier sur plusieurs dimensions : sociale, spatiale et économique (en termes d’exploitation). Enfin, il restitue la réalité à trois échelles : celle du terroir, celle du leydi et enfin par extrapolation celle du delta.

61 En colonnes, le tableau comporte la liste des acteurs identifiés comme ayant un pouvoir décisionnel sur l’usage et l’exploitation des ressources naturelles. Cette liste ne se prétend pas exhaustive, mais reste en rapport avec le contexte deltaïque. Par exemple, nous n’avons pas inclus le maître de terre car il est trop souvent relégué à une fonction uniquement sacrificielle. Cependant, on trouve encore dans le delta des maîtres de terre (et parfois des ji tuu en faisant office) qui conservent la fonction de gestionnaire foncier. En lignes sont portés les types d’espaces fonciers. L’unité d’exploitation se définit comme l’organisation économique de base, constitutive d’un pôle de décision, d'une organisation propre et d’une gestion indépendante des éléments naturels recueillis ou produits.

62 Le foncier halieutique présente une spécificité car la pêche s’exerce sur un espace déterminé, selon une technique spécifique, à un moment donné. La technique de capture de la ressource animale constitue le référent en termes de foncier halieutique. De ce fait, traditionnellement, un espace peut devenir le siège de plusieurs pêcheries, réunissant ainsi plusieurs acteurs fonciers, ce que la tendance à l'exclusivité annuelle sur l’espace-ressource fait disparaître. Une territorialisation de l’espace se réalise maintenant sur tout le cycle ichtyologique et non pas seulement sur une période précise correspondant à l’usage d'un engin spécifique (ce que l'on appelle la pêcherie traditionnelle). Cela ne supprime pas, bien entendu, le caractère « technotopique » de la pêche mais par ailleurs celui-ci se voit atténué par l’usage d’engins moins diversifiés dans l’année. Le pêcheur exerce sur l’espace soit simplement un droit d’exploitation (exclusive ou pas) dans les plaines et les mares, soit un droit exclusif dans les fleuves et chenaux, et parfois uniquement un droit de prélèvement. La pêche au moyen de la petite nasse placée la nuit à proximité du campement correspond à un droit de prélèvement sur la ressource halieutique. C’est une pêche admise librement pour tous.

Tableau 22 - Essais d'un système matriciel du régime foncier, simplifié, du delta intérieur du Niger.

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Bien que dressée à partir de l’exemple du leydi Wuro Neema, la représentation matricielle des rapports fonciers dans le delta (tabl. 22) inclut des données absentes dans cette zone et présentes en d’autres points du delta, afin de présenter un système traduisant au mieux la réalité foncière. Quant à l’activité cynégétique, les données présentées ont été recueillies uniquement dans la zone d’étude et n’ont pas fait l’objet de recoupements avec les données d’autres leyde, ce qui fait qu'elles ne sont donc pas généralisables à l’ensemble du delta.

63 Actuellement, le delta n'a pas un régime foncier homogène, mais il est plutôt sous l’emprise d’une série de règles locales et parfois micro-locales, liées à des rapports de forces trouvant leur origine au sein d’une histoire plus ou moins lointaine. À travers le tableau 22 se dégage un schéma foncier global qui traduit cette hétérogénéité représentative des situations entre leyde, et qui offre une lecture d’ensemble du système foncier.

64 L’existence d’une pluralité de sources de droits apparaît dans la concurrence sur le droit halieutique, par exemple, où interviennent à la fois le village, le maître des eaux et l’État.

65 Un même espace peut faire l’objet de plusieurs exploitations non antinomiques, simultanées ou successives. Dans ce cas, l’espace en question supporte une série de droits fonciers différents. Certains espaces sont plus ou moins susceptibles de supporter plusieurs usages à la fois, tandis que d’autres ne peuvent répondre qu’à un seul. Pour illustrer ce dernier cas, on peut prendre l’exemple de la mare aménagée en pisciculture ou la saline et les infrastructures pastorales de passage et de gîte temporaire. Concernant les cours d’eau et les chenaux, leur triple vocation – pastorale, agricole et sylvicole – s’explique par l’élément ressource en eau. Cela se traduit par l’action d’abreuver les troupeaux, par l’exhaure de l’eau, par pompage ou par dérive physique, pour l’irrigation et l’arrosage de cultures agricoles (périmètres irrigués, maraîchage ou verger) ou sylvicoles.

66 Il convient enfin de dégager le rôle de chacun des acteurs sociaux vis-à-vis des ressources naturelles, à partir du système matriciel du régime foncier du delta. Comment s'effectue la répartition des droits en fonction de leurs statuts respectifs ? Nous partons de l’acteur indifférencié pour parvenir aux décideurs traditionnels, avant d’arriver à l’État qui tente de se substituer aux gestionnaires traditionnels du milieu au moyen du droit étatique foncier (concession rurale, immatriculation), forestier (réglementation normative) et halieutique (permis de pêche et réglementation normative).

67 Le droit foncier deltaïque comprend un pôle de décision à chaque niveau de la strate sociale, ces niveaux étant l'unité de production, la famille, le village, et à chaque type d’espace-ressource, qu’il soit halieutique (maître des eaux), pastoral (maître des pâturages) ou agraire (chef de village ou maître des pâturages ou maître de terre). Cette lecture de la dynamique foncière deltaïque nous conduit à penser une formulation juridique répondant au besoin d’une gestion à long terme.

Tableau 23 – Superposition de droits fonciers environnementaux sur un même espace.

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Tableau 24 - L'affectation des lieux.

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Proposition d'un régime juridique pour une gestion patrimoniale

68 La gestion de l’environnement s’articule à l’origine autour d’un jeu d’obligations et de solidarités. L’objet d’un système de partition juridique est de dissocier les différents rapports de pouvoir, partant du simple passage jusqu’à la gestion intentionnelle, afin d’appliquer à chaque niveau effectif (passage, prélèvement, exploitation) les règles de comportement adoptées et négociées au niveau du contrôle (exclusion, gestion intentionnelle). Si chaque niveau dispose d’une certaine indépendance, en fait les relations introduites par la gestion du patrimoine commun génèrent la nécessité de coordonner, d’orienter et de contrôler, voire parfois d’imposer, les pratiques et les méthodes d’action sur un milieu plus ou moins artificialisé.

Des contraintes cristallisées dans un faisceau de maîtrises

69 Afin de faire apparaître les obligations auxquelles les droits sont inféodés, nous proposons une construction qui permette à différents centres de gestion de s’exercer sur un même espace, de façon responsable et légitime. Dans cette optique, les droits des acteurs se définissent dans des « maîtrises foncières environnementales » qui cristallisent les contraintes afférentes au rapport homme/milieu pour une coviabilité des systèmes sociaux et écologiques.

70 La maîtrise foncière environnementale est l’expression d’un pouvoir de droit sur le milieu. On assortit ce pouvoir sur la terre, l’espace, les éléments naturels et les processus écologiques d’une obligation de comportement. Quelle que soit l’emprise de l’homme sur le milieu, tout droit octroyé génère des obligations vis-à-vis des autres membres de son groupe ou d’autres groupes. Cette dichotomie droit/devoir, bien connue, joue un rôle fondamental dans la gestion des ressources naturelles renouvelables. Toute maîtrise implique donc des obligations. La responsabilisation se situe dans la « redevabilité » qui consiste à entretenir une relation non préjudiciable avec la ressource eu égard aux autres utilisateurs. Dans le delta intérieur du Niger, la démonstration est flagrante lorsque les chevriers, les Bella ou les Peuls Fulinkriyabe semi-sédentaires, sont mis à l’index à cause, d’une part, de leurs pratiques de coupe abusive sur des ligneux et, d’autre part, de leur irrespect des règles locales d’accès aux ressources. La subsistance des hommes étant dépendante des ressources naturelles renouvelables, les rapports sociaux se trouvent grandement liés aux processus écologiques dont dépend également la reproduction du groupe. Plus le droit sur la ressource est élevé, plus la responsabilité de celui qui en a la maîtrise augmente : le simple respect cède la place à la gestion à court terme, qui précède la gestion à long terme. La maîtrise foncière rassemble donc le droit et les obligations tout comme les deux faces d’une pièce de monnaie. Les maîtrises foncières répondent à ce besoin de responsabilisation et offrent la possibilité d'un contrôle permanent sur l’usage des ressources.

71 Ainsi les maîtrises foncières pourraient-elles se dégager des différents droits :

72 a) Le droit de passage donne lieu à une « maîtrise minimale », car le fait d’être présent en passant d’un point à un autre constitue une action minimale. L’obligation consiste à se maintenir dans certaines limites et à ne faire que traverser l’espace intéressé sans exercer aucune autre action sur le milieu.

73 b) Le droit de prélèvement ou de cueillette constitue une « maîtrise ponctuelle » sur la ressource. L’obligation consiste à prendre pour son propre usage ou celui de sa famille, sans porter préjudice à la régénération de la ressource.

74 c) Le droit d’exploitation – c’est-à-dire de culture, de pâture, de pêche, de chasse ou de coupe d’arbres – mais aussi de préservation, représente une « maîtrise spécialisée », car elle concerne un système d’utilisation spécifique. L’obligation est de deux sortes : 1. prendre toutes les mesures conservatoires de protection du sol et de gestion durable du milieu (lutte anti-érosive, reboisement, arborisation, amendement du sol, etc.) pour le court et moyen terme ; 2. utiliser effectivement l’espace dans un objectif de production alimentaire ou de protection écologique. Cette maîtrise est soit déléguée, soit attribuée, soit ordonnée. Les maîtrises spécialisées attribuée et déléguée se différencient en fonction du rapport entre les acteurs. Lorsque ce lien est familial ou intra-villageois, qu’il s’agisse d’une terre beitel (commune) ou familiale, le droit est délégué, car la situation reste gérée au sein du groupe. Si l’emprunteur est étranger à la famille ou au village, le droit lui est attribué. La maîtrise spécialisée ordonnée concerne le cas où l’exploitation repose sur un ordre d’accès prédéterminé.

75 d) Le droit d’exclusion, revenant à autoriser ou refuser l’exploitation à autrui, institue une « maîtrise exclusive ». L’obligation est là aussi de deux ordres : 1. prendre toutes les mesures conservatoires de protection du sol et de gestion durable du milieu (lutte anti-érosive, reboisement, arborisation, amendement du sol, etc.) pour le long terme et contrôler si le mode d’exploitation est conforme à une utilisation durable du milieu ; 2. utiliser effectivement l’espace dans un objectif de production alimentaire ou de protection écologique et réaliser les investissements nécessaires pour optimiser la production ou la préservation des écosystèmes et conserver la capacité de régénération du milieu.

76 La maîtrise exclusive peut être spécialisée ou générale. La maîtrise exclusive spécialisée fait référence à un système d’exploitation unique et saisonnier sur l’espace, tandis que la maîtrise exclusive générale désigne toute forme d’exploitation qui se réalise sur toute l’année. Les droits sur la ressource se pérennisent rarement sur un lieu toute l’année, mais seulement pendant une saison. C'est le cas de l’agriculteur, qui utilise la terre du labour, des semailles, jusqu’à la récolte ; du pasteur, qui descend dans le burgu avec ses animaux à la décrue et qui y reste jusqu’aux pluies de juin/juillet à la montée des eaux. Il en va de même du pêcheur, qui dépend du cycle hydrologique et ichtyologique, des troupeaux transhumants, qui utilisent les couloirs et pistes pour rejoindre et quitter leurs pâturages, enfin des bergers, qui font paître leurs animaux dans les champs après les récoltes.

77 Chacune de ces maîtrises autonomise l’acteur en le responsabilisant au sein du groupe. La maîtrise confère, en même temps qu’un droit, une fonction sociale, traduite par le comportement du titulaire vis-à-vis de la ressource. Le groupe est, à son niveau, responsabilisé par un pouvoir sur son capital en ressources et conditionne par sa propre gestion à la fois son avenir immédiat et lointain, ce dernier étant lié à son potentiel de reproduction qui dépendra des ressources disponibles. Cette réalité relève d’une conception subjective et relationnelle du patrimoine développée par H. Ollagnon et reposant sur trois principes : 1) tout groupe doté d’un degré d’identité autonome détient un patrimoine qui assure sa survie ; 2) le maintien d’une identité autonome exige une conduite générale uniforme ; 3) cette conduite s’exprime dans une gestion d’ensemble du patrimoine, à laquelle chaque membre est intéressé (tiré de Montgolfier et Natali , 1987 : 52, adapté à notre réflexion). On peut en retenir la définition suivante, qui exprime bien la logique patrimoniale dans laquelle se situent les maîtrises minimale, prioritaire, spécialisée et exclusive : le patrimoine est « l’ensemble des éléments matériels et immatériels qui concourent à maintenir et à développer l’identité et l’autonomie de son titulaire par adaptation en milieu évolutif » ( ibid. ). Les maîtrises foncières environnementales citées relèvent donc d’une gestion de l'environnement plus utilitaire qu’éthique.

78 e) Le droit de gestion intentionnelle consiste à orienter le comportement des acteurs locaux dans deux sens : celui d'un dynamisme économique conduisant à la sécurité alimentaire et celui d’une préservation de la capacité de régénération du milieu et de la conservation de la biodiversité. Ce droit donne lieu à la « maîtrise intentionnelle ». L’obligation est ici assumée par l’État, les instances décentralisées et d’autres rouages de décision qui ont la charge de prendre toutes les mesures et dispositions pour assurer la conservation du patrimoine foncier et environnemental, et inciter puis soutenir et développer le processus économique de production alimentaire. La maîtrise intentionnelle ne peut donner de résultats qu’en associant étroitement les acteurs locaux aux objectifs poursuivis et en procédant par les différentes voies incitatives, contractuelles et réglementaires. Des espaces de concertation locale devraient être créés en tant que relais de cette gestion intentionnelle.

79 La maîtrise intentionnelle correspond de fait à une conception patrimoniale plus « objective », moins utilitariste que les autres, en intégrant un souci de préserver les libertés de choix des générations futures et en évitant de s'engager dans des perspectives qui mèneraient à des impasses. Le patrimoine qui doit être géré actuellement constitue le potentiel de survie des générations futures. Il est « un ensemble d’éléments susceptibles, moyennant une gestion adéquate, de conserver dans le futur des potentialités d’adaptation à des usages non prévisibles aujourd’hui » ( ibid. ).

80 L’intérêt général de protection de l’environnement, proclamé par la loi ou la Constitution, donne lieu à un droit de protection, une maîtrise intentionnelle, dont l’effet d’ubiquité se répercute à tous les niveaux de gestion. L’objet de cette maîtrise est d’initier et d’accompagner une gestion environnementale. Elle se répercute sur les autres maîtrises par l’application d’une réglementation environnementale, forestière, halieutique, cynégétique, d’aires protégées et de protection d’espèces. La maîtrise intentionnelle est à l’origine de conventions de gestion, de forums, de campagnes d’information et de sensibilisation afin de promouvoir une protection plus consensuelle que répressive de l’environnement.

81 La gestion intentionnelle agit sur la gestion effective de l’environnement grâce au relais opérationnel de la maîtrise exclusive des communautés sur leur milieu. Celle-ci a pour effet de régenter non seulement les comportements (les méthodes, les techniques) mais aussi les engins employés tels que les engins de pêche et de chasse. Le droit exclusif du groupe permet surtout de déterminer les usages admissibles en fonction de l’état des écosystèmes. La maîtrise exclusive constitue ainsi un droit de gestion patrimoniale, associé à l'accaparement de « l’espace-ressource » ou de l’espace géographique (terroir villageois) par la communauté.

82 La constitution malienne du 25 février 1992 intègre plusieurs articles exprimant la volonté et la nécessité de protéger l’environnement et amenant la possibilité de considérer que la protection de l’environnement est une activité d’intérêt général : « Le peuple souverain du Mali [...] s’engage à assurer l’amélioration de la qualité de la vie, la protection de l’environnement et du patrimoine culturel » (préambule) ; et « Toute personne a droit à un environnement sain. La protection, la défense de l’environnement et la promotion de la qualité de la vie sont un devoir pour tous et pour l’État » (article 15).

À chaque maîtrise foncière correspond une obligation de comportement qui vise à pérenniser la ressource. La gestion conservatrice n’incombe pas à un seul acteur mais à tous ceux qui ont accès à la ressource :
La maîtrise minimale implique un droit de circulation et parfois de stationnement limité dans le temps et délimité dans l’espace.
La maîtrise prioritaire donne lieu à un prélèvement de subsistance sur les fruits réalisé de façon à ne pas nuire à la régénération de la ressource (sans atteinte à sa substance).
La maîtrise spécialisée concerne une exploitation qui doit s’effectuer avec le souci de maintenir la capacité de régénération de la ressource à moyen terme (fertilité du sol, stock du poisson ou gibier, qualité et densité du pâturage, état et densité du couvert ligneux, etc.).
La maîtrise exclusive assure une gestion patrimoniale de la ressource sur le long terme. Elle permet une limitation de la pression sur le milieu, décide de la fixation des périodes de chasse, de pêche, de l’entrée du bétail dans les pâturages, du type d’engins cynégétique et halieutique utilisable, permet la création d'aires protégées, de mise en réserve ou de mise en défens, etc. Ainsi, cette maîtrise a pour finalité de transmettre le patrimoine aux générations suivantes.
La maîtrise intentionnelle se caractérise par le souci de préserver les libertés de choix des générations futures en évitant de s’engager dans des perspectives qui mèneraient à des impasses. Le patrimoine qui doit être géré actuellement constitue le potentiel de survie des générations futures. La protection des écosystèmes et de la biodiversité n’est le monopole de personne et elle s’effectue à tous les niveaux des rouages sociopolitiques et des prises de décisions. De plus, la sécurité alimentaire nécessite une croissance de la production ou du moins un certain niveau que l’on ne peut atteindre de façon durable qu’en rationalisant l’exploitation du milieu.

Le système des maîtrises foncières environnementales que nous proposons tente de répondre au besoin d’un nouveau droit que la colonisation n’a pas su trouver.

83 En définitive, l’adoption des maîtrises foncières environnementales comme clefs de détermination des droits sur le milieu permet à la fois d’éviter le régime réducteur de la propriété (foncière) et de ne pas s’opposer aux logiques locales, d’adopter une approche qui satisfait les intérêts communautaires et individuels, d’intégrer l’ensemble des interactions où le rapport homme/milieu s'inscrit sous forme de droits, et de sécuriser chaque mode d’exploitation en tenant compte de ses particularités. La définition de leur nature juridique permet de constater que leur caractère n’est réductible à aucune catégorie juridique préexistante et qu’il se trouve être constitutif d’un genre nouveau (sui generis).

84 Le système des maîtrises foncières environnementales que nous proposons tente de répondre au besoin d'un nouveau droit que la colonisation n’a pas su trouver : « Les communautés (africaines) fonctionnent par le principe d’endo-régulation et, jusqu’à une période récente, l’ensemble de ces mécanismes pouvait fonctionner de façon satisfaisante. La colonisation a cependant voulu intervenir dans ce système et s’est efforcée de le faire par une ouverture des rapports fonciers à l’extérieur des communautés pour mettre la terre sur le marché et généraliser sa conception de la propriété foncière. Or, elle a échoué : ainsi se pose le problème actuel d’un régime juridique tout à fait original » ( Le Roy , 1989a : 149). Nous nous trouvons donc confrontés à un problème de taille. Si le régime civiliste de la propriété foncière ne peut être appliqué, comment est-il possible de s’exprimer face aux situations qui font instinctivement appel à des références du droit des biens ? Certes, le droit anglais apporte une ouverture différente et l’histoire française reste aussi riche d’enseignements. Mais c’est surtout une lecture anthropo-juridique (la moins ethnocentrique possible) qui nous permet d’accéder à la compréhension des réalités locales. Étienne Le Roy énonce bien la gageure du défi en ce qu’il « existe des difficultés de terminologie : dans un système qui ne connaît pas la propriété, on ne peut parler ni de propriété collective ni de démembrement du droit de propriété, d’usage, d’usufruit ou de la nue propriété. Il est extraordinairement difficile de se comprendre, lorsque l’on a non seulement des références terminologiques mais des logiques fondamentalement divergentes » ( ibid. : 160).

85 Si la gestion effective met à jour les relations entre un système social et un système écologique, les maîtrises foncières environnementales les fixent dans un cadre structurel. L’organisation des droits sur le milieu permet, en théorie du moins, de « piloter » les comportements humains et dans tous les cas d’opérer un contrôle assorti d’une responsabilisation du jeu des acteurs. La qualification des pratiques autorisées jalonne le lien entre les sociétés et leur nature. C’est pourquoi l’intégration des deux dimensions sociale et écologique dans une construction juridique originale génère un régime juridique spécifique. L’opportunité d’une telle démarche se justifie, comme on l’a vu, par l’absence d’un cadre juridique préexistant adapté à la dynamique environnementale africaine et plus particulièrement sahélienne.

Les maîtrises foncières environnementales, rouages de la coviabilité des systèmes sociaux et écologiques

86 Le système des maîtrises foncières environnementales n’est pas une boîte à outils contractuels, consensuels ou réglementaires, mais il constitue lui-même un régime juridique au même titre que celui de la propriété, permettant une régulation des comportements sociaux vis-à-vis de l’environnement. Le système proposé s’articule autour de cinq types de droits qui définissent respectivement cinq maîtrises. Celles-ci se superposent mais ne se cumulent pas forcément. En effet, il ne s’agit pas d’un pouvoir absolu sur une chose qui se démembre en une pluralité de droits, mais d’une répartition de droits entre tous les acteurs qui interviennent sur l’environnement. Le tableau 25 rappelle le canevas d’ensemble.

Tableau 25 - Système des maîtrises foncières environnementales.

Dans le cadre d’une relation d’affectation à un usage, et non d’appartenance, la fiction de « l’appropriation » de l’espace n’a pas de sens pour des sociétés africaines rurales.

87 Chaque maîtrise sur l’environnement (ressource, milieu) intègre une prérogative spécifique (passage, prélèvement, exploitation, exclusion, gestion intentionnelle) assortie de l’exigence d’un comportement favorable à un développement durable. La maîtrise foncière constitue une relation de pouvoir sur « l'espace-ressource » et sous-entend des droits et des devoirs. En cela, elle correspond à un véritable pouvoir de droit et non pas à un simple pouvoir de fait. Elle peut être définie de la façon suivante : la maîtrise foncière environnementale est un droit qui exprime un rapport de pouvoir entre un homme ou un groupe et un milieu considéré à la fois comme « espace-ressource » et écosystème. Ce droit se traduit par le contrôle de l’espace, l’accès à la ressource (élément naturel renouvelable), l'appropriation de la ressource (élément économique) et la préservation de la biodiversité. Chacun de ces niveaux fait partie d’un processus de gestion patrimoniale de l’environnement, porteur de la coviabilité des systèmes d’exploitation et des systèmes écologiques.

88 Chaque droit constitutif d’une maîtrise foncière environnementale s’exerce non pas sur un fonds, mais sur un espace (« espace-ressource » et espace écologique) non susceptible d’appropriation et considéré comme un patrimoine commun au groupe concerné, qu’il soit lignager, villageois ou autre. Si l’on se réfère aux catégories juridiques du droit romain, « l’espace-ressource » peut être rapproché de la notion de chose commune, mais pas dans la définition qui en est donnée en droit français ancien ou moderne. En premier lieu, la communauté n’est ici pas universelle, mais elle est bien délimitée à un groupe social particulier, un corps moral des générations passées, présentes et futures. Ensuite, la chose en question (une pêcherie, un pâturage, un champ, une aire écologique, etc.) n’est pas un élément insaisissable en régime propriétariste puisqu’elle peut faire l’objet d’une appropriation, alors que la caractéristique de la res communis est justement l’impossibilité de son appropriation. Or, justement, dans le cadre d’une relation d'affectation à un usage et non d’appartenance, la fiction de « l’appropriation » de l’espace n’a pas de sens pour des sociétés africaines rurales. En dehors du régime de la propriété foncière, la définition de la chose commune paraît donc pouvoir être appliquée aux « espaces-ressources », d'autant plus que le droit international sacralise la chose commune dans la notion de patrimoine commun de l’humanité. Le pas franchi dans le droit international peut l’être aussi dans le droit africain : la res communis définit le patrimoine d’une communauté.

89 Le rapport de l’homme envers le milieu se présente comme un rapport de dépendance. Cette relation de dépendance génère pour le groupe un rapport patrimonial créateur d’un lien entre le passé et le futur. La communauté présente bénéficie de moyens de vie et de développement qui reposent en grande partie sur le legs des ascendants. Dans un objectif de reproduction sociale, l’idée d’une situation de redevabilité par rapport aux futurs membres de la communauté peut en être déduite. Le support d’existence transmis aux générations à venir se compose des « espaces-ressources » et d’une diversité biologique (incluant une diversité de milieux). La qualité « écologique » de ce legs constitue le capital de la communauté qui doit être pérennisé et développé. Le véritable héritage qui est transmis et dont la génération présente est responsable est constitué par l’état de l’environnement, la richesse écologique du milieu qui offre certaines potentialités d’usage, d’exploitation et de bien-être pour chaque individu. Ce capital nature est quant à lui « appropriable » en ce qu’il peut être réduit, conservé en l’état ou augmenté.

90 Le capital nature présente soit un intérêt commun, soit un intérêt général. Dans le cadre d’un patrimoine « subjectif », le groupe est en position de créancier face aux individus débiteurs de l’obligation de conserver la substance même des éléments naturels utilisés et la préservation de la biodiversité. Ce genre de relation (des droits contre des devoirs) repose sur l’impérieuse nécessité qu’a le groupe de conserver ses moyens de survie, de vie, de développement et de reproduction. Dans le cadre d’un patrimoine « objectif », le groupe intègre une dynamique d’intérêt général de protection de l’environnement dans lequel tout rapport avec le milieu est soumis à des règles et fait l’objet de conventions.

91 Le rapport avec le milieu se traduit non pas par des droits de possession mais par des droits de prélèvement, d'exploitation et de conservation. L’individu, la famille restreinte (le couple) et le groupe sont respectivement titulaires de droits sur la chose commune qui se confondent avec celle-ci. En effet, le droit s’assimile à la chose, en s’incrustant en elle. Les maîtrises foncières environnementales sont de ce fait des droits réels en ce qu’elles expriment ce « pouvoir juridique selon lequel une personne peut retirer directement tout ou partie des utilités économiques d’une chose » ( Carbonnier , 1995 : 78) dans le fait de pâturer, chasser, pêcher, cultiver, couper du bois, etc. Cependant, l’assujettissement de la chose au titulaire du droit n'est pas total en raison de l’absence d’un droit de disposition et de l’obligation d’un comportement patrimonial. La communauté dispose d’un pouvoir juridique qui lui permet d’exiger des membres de son groupe et des étrangers un comportement conservateur de la ressource renouvelable et ne portant pas atteinte à la biodiversité. On peut assimiler ce rapport de droit à une situation de créancier à débiteur, dans laquelle l’utilisateur de l’environnement est assujetti aux intérêts de la communauté vis-à-vis de son environnement. À ce titre, la maîtrise foncière environnementale est un droit personnel. L’intérêt commun du groupe exprime donc des droits sur l’environnement qui sont à la fois réels et personnels.

92 Les étrangers sont aussi assujettis aux impératifs d’une jouissance précautionneuse dans le cadre d’un passage limité dans le temps et l’espace et d’un prélèvement parcimonieux. Le terroir villageois subit un accès libre au passage et au prélèvement, qui donne lieu à une sorte de servitude réelle de type servitude d’utilité publique, c’est-à-dire dépourvue de l’existence d'un fonds dominant. Cette servitude est soumise au contrôle de la communauté villageoise, qui dispose d’une maîtrise exclusive sur son terroir.

93 Le modèle des maîtrises foncières environnementales présenté correspond à un régime juridique original, dont la logique reste très éloignée du droit des biens du Code civil français. De fait, il ne nous a pas été possible de rassembler dans une même construction des droits appartenant à des systèmes opposés. Le droit positif (vivant) intègre dans sa sphère une pluralité de sources de droits mais peut-il associer différents systèmes juridiques ? Ainsi, le régime patrimonial proposé et celui relevant de la propriété foncière répondent chacun à des situations distinctes et caractéristiques d’un contexte socio-économique et culturel ainsi que d’un choix politique.

94 Étienne Le Roy a pourtant proposé d’intégrer les deux logiques en élaborant un modèle général, qui appréhende à la fois toutes les situations, qu’il concrétise dans une théorie des maîtrises foncières.

Une théorie des maîtrises foncières

95 La théorie des maîtrises foncières d’Étienne Le Roy répond à un objectif de régulation des rapports de l’homme à la terre ( Le Roy et al., 1996 ; Le Roy , 1992 c, 1995 a et 1995 b). Il retient à ce titre qu’un espace peut voir son statut changer selon son usage, impliquant par là la notion d’appropriation mais selon le critère de l’affectation. La notion de maîtrise foncière découle ainsi de « l’exercice d’un pouvoir et d'une puissance, donnant une responsabilité particulière à celui qui, par un acte d’affectation de l’espace, a réservé plus ou moins exclusivement cet espace. La notion de maîtrise permet de relier les références à la souveraineté et à la propriété qui “encadrent” les pratiques foncières [...] en soulignant qu’à leur intersection des droits et des obligations particulières peuvent naître d’une affectation de l’espace [...] » ( Le Roy , 1995 a : 489). Pour cet auteur, la maîtrise foncière est considérée comme un concept homéomorphe (sic) de type interculturel, appréhendant à la fois les logiques « traditionnelles » africaines et « modernes » coloniales et post-coloniales ( Le Roy , 1995 b : 464). La solution est donc hybride, c’est-à-dire intéressant à la fois l’actuel droit étatique (reposant sur le régime de la propriété foncière) et les droits traditionnels.

96 Cette logique retient également cinq types de maîtrises foncières, mais les conçoit comme des modes d’appropriation. Deux maîtrises relèvent du Code civil et sont appelées « indifférenciée » (avec un droit d’accès) et « absolue » (avec le droit d’aliéner). Les trois autres relèvent du droit traditionnel : la maîtrise dite « prioritaire », qui correspond aux droits d’accès et d’extraction, la maîtrise dite « spécialisée », qui correspond aux droits d’accès, d’extraction et de gestion, et enfin la maîtrise dite « exclusive », qui correspond aux droits d’accès, d’extraction, de gestion et d’exclusion. Ces droits d'accès, d’extraction, de gestion, d’exclusion et d’aliénation se retrouvent dans le cadre d’analyse de E. Schlager et E. Ostrom sur les droits de propriété.

97 Edella Schlager et Elinor Ostrom ont développé, dans le contexte de la pêche au homard dans l'État du Maine aux États-Unis, un cadre analytique des droits de propriété ( Schlager et Ostrom , 1992) qui présente les différents droits constitutifs de la propriété. Audun Sandberg reprend cette même analyse qu’il applique au Grand Nord norvégien. Ces auteurs proposent un cadre d’analyse « des droits de propriété » des ressources communes constituées par des espèces animales (poissons, crustacés, œufs d’oiseaux, etc.) et végétales (forêts, baies sauvages, herbages) en considérant cinq droits de propriété : d'accès (« pour entrer dans une zone physique définie »), de prélèvement (« pour récolter les produits provenant d’une ressource particulière »), de gestion (« permettant de réglementer les modes d’usage et de transformer la ressource en réalisant des améliorations ou en la négligeant »), d’exclusion (« pour décider des bénéficiaires potentiels du droit d’accès et des conditions d’obtention, de perte ou de transférabilité de ce droit »), d’aliénation (« pour autoriser la vente ou la location de l’un ou l’autre des deux autres »). Ce dernier droit correspond à la pleine propriété. Chaque droit est en relation avec un titulaire : le propriétaire en droit, le propriétaire de fait, l’ayant droit, l’utilisateur autorisé et l’utilisateur non autorisé.

Les maîtrises que nous développons répondent à une définition émanant d’une approche environnementale qui rompt avec une logique strictement foncière. Nous ne situons pas la logique des pratiques locales dans le cadre de « modes d’appropriation » de l’espace, mais plutôt dans un rapport de pouvoir de gestion qu’expriment des droits.

98 Les Anglo-Saxons n’appréhendent pas la propriété sous l’angle absolutiste et unitaire du Code civil français, mais en termes d’intérêts constitutifs d’un faisceau autour de l’immeuble concerné, c’est la raison pour laquelle les auteurs considèrent autant de droits de propriété que de prérogatives.

99 On remarque que la ressource ne fait ici l’objet que d’un « prélèvement » et qu’elle n’entre pas dans le cadre d’un système d’exploitation. Le prélèvement consiste pour les auteurs à récolter les produits d’une ressource, elle-même résultant d’une production de la nature. Ils ne distinguent pas le simple droit d’usage viatique et l’exploitation commerciale. De plus, différencier la gestion de l’exclusion pose un problème de définition car la gestion de la ressource consiste à organiser son prélèvement ou son exploitation. L’absence dans ce droit de gestion de la faculté de limiter l’accès à la ressource selon des critères techniques ou organiques pose problème.

100 L’originalité des travaux d’Étienne Le Roy est de combiner au sein d'un tableau ces différents droits avec des modes dits de « co-gestion ». L’auteur considère cinq types de cogestion : public (ce qui et commun à tous), externe (ce qui est commun à quelques groupes), interne-externe (ce qui est commun à deux groupes), interne (ce qui est commun à un seul groupe) et privé (ce qui est propre à une personne physique ou morale). Ainsi, la théorie offre, selon l’auteur, vingt-cinq modes de régulations pour « se donner la capacité de saisir et d’encadrer les situations de terrain » (1996 : 74 et voir le tableau 5 : 73).

101 Quant à nous, les maîtrises que nous développons répondent à une définition émanant d’une approche environnementale qui rompt avec une logique strictement foncière. Elles conduisent à distinguer une gestion effective reliée aux actes de chacun et une gestion intentionnelle donnant lieu à une forme de maîtrise permettant d’orienter le comportement des acteurs. De plus, nous ne situons pas la logique des pratiques locales dans le cadre de « modes d’appropriation » de l’espace, mais plutôt dans un rapport de pouvoir de gestion qu’expriment des droits (de passage, de prélèvement, d’exploitation, d’exclusion et de gestion intentionnelle). Enfin, le passage du droit à la maîtrise définit un système de gestion patrimoniale des relations environnementales des hommes au milieu, au sein des rapports internes et externes des communautés.

Éléments pour l'effectivité d'une gestion locale à long terme

102 Contrairement à l’idée d’une utopie patrimoniale, « loin d’être le fruit d’une rêverie juridique utopique, le “modèle patrimoine" apparaît plutôt comme un sursaut néguentropique, un formidable effort de rationalité d’une humanité qui n’entend pas être privée de son avenir » (OST, 1995 : 337). En ce sens, l’intérêt subjectif à la protection de l’environnement conduit à cette rationalité seulement si les acteurs sont tous admis à la gestion du milieu. L’intégration de chacun dans la logique de conservation du milieu nécessite la reconnaissance des autorités légitimées par les populations (traditionnelles ou modernes) ainsi que des droits qui s’exercent sur les espaces et les ressources.

Des pouvoirs légitimes à intégrer dans la gestion locale

103 L’absence de considération par le droit étatique malien des pouvoirs traditionnels (maître des pâturages, maître des eaux, maître de terre, chef de village) aboutit à une situation d’accès libre à la ressource et d’absence de protection de l’environnement. Dans les faits, malgré la nationalisation de la terre, des pâturages et des eaux, les populations continuent de vivre en se référant à des schémas de pensée dans lesquels les instances coutumières jouent un rôle important. L’intégration de ces instances dans un système de gestion locale s’avérerait préférable au fait de les ignorer. C’est pourquoi il paraît judicieux de replacer les autorités coutumières dans leur fonction, en les officialisant au sein d’un cadre collectif de type comité de gestion qu’elles présideraient par exemple, plutôt que de les supprimer au profit de comités d’obédience administrative. Nous pensons ici aux comités de gestion de pêche placés sous la tutelle d’une autorité déconcentrée de l'État, censés remplacer les maîtres des eaux. Le référent serait ainsi conservé et l’adaptation acquise. L’objectif est de conserver une autorité qui soit légitime aux yeux des populations pour assurer le relais (indispensable) d’une gestion intentionnelle de l’environnement issue d’un niveau plus global (région ou commune rurale).

104 Le prix de l’herbe, conngi, ou la « part de l’eau », manga ji (le prix de pêche), monétarisés sont suffisamment entrés dans la vie courante pour que s’inscrive dans la conscience collective l’idée que la ressource a de la valeur. Ces redevances limitent et organisent l’accès à la ressource d'une façon qui pourrait certainement être plus efficace que le permis de pêche institué par l’État. Ces responsabilités de gestion, contreparties du prix de l’herbe et de l’eau qui sont perçus par le jowro ou par le maître des eaux, devraient être exprimées beaucoup plus clairement, car elles se trouvent dénaturées et transformées par la monétarisation. Qui plus est, le droit étatique ne les reconnaît pas et va même jusqu’à les interdire. L’obligation de gestion nécessiterait une redéfinition de ces « prix » en vue d’une responsabilisation dans le cadre d’une reconnaissance statutaire. Le jowro prendrait en charge la régénération de la bourgoutière et s’engagerait à limiter la pression qui s’exerce sur ce milieu. L’encadrement du jowro par un comité de gestion pastorale permettrait de le cantonner dans ses tâches et de l’assister tout en le contrôlant.

105 En ce qui concerne le territoire villageois, il semble nécessaire que le conseil de village, présidé par le chef de village, en assume le contrôle, notamment celui des ressources forestières. Il devrait pour ce faire en organiser la surveillance et développer des opérations de reboisement ou de lutte contre la désertification dans le cadre de la décentralisation.

Le besoin de sécurisation juridique sur les espaces et les ressources

106 La sécurisation foncière environnementale constitue la clef de voûte de l’organisation de la gestion viable à long terme des ressources naturelles renouvelables. La pression que les populations exercent sur celles-ci impose une reconsidération profonde des attributions juridiques opérées jusqu’ici. Ainsi, le droit se trouve confronté à l’épreuve de la variabilité hydro-géographique des « espaces-ressources », au défi de leur délimitation et au statut qu’il convient de leur conférer.

L'épreuve de la variabilité hydro-géographique de « l'espace-ressource »

107 La variabilité hydro-géographique s’exprime de façon irrégulière et hétérogène. Le delta intérieur subit une crue dont la lame d’eau recouvre une superficie plus ou moins grande selon les années et génère une dynamique changeante des ressources disponibles. À cette fluctuation spatiale saisonnière ou pluriannuelle de la disponibilité des ressources, comment le droit peut-il répondre actuellement ?

Quand la ressource disparaît, le droit qui lui est rattaché disparaît simultanément.

108 Le cas de l'assèchement de mares ou de zones humides où poussait le burgu est symptomatique. Quand la ressource disparaît, le droit qui lui est rattaché disparaît simultanément. Le droit sur l’espace est un droit sur la destination ou la vocation du lieu (pastoral, halieutique, agraire). Cependant, s’il est possible que la nouvelle ressource soit exploitée par ceux qui exerçaient un pouvoir sur l'ancienne, souvent ce sont de nouveaux exploitants qui s’en emparent. Mais, si les anciennes conditions réapparaissent, il arrive que les anciens exploitants reviennent. Dans le cas de remplacement de pasteurs par des cultivateurs, ceux-ci doivent-ils à leur tour abandonner leurs champs ? Y a-t-il une réaffectation de l’espace, support de la ressource disparue, mais qui est susceptible de revenir avec le retour de l'inondation ? L’écosystème naturel transformé en système agraire doit-il être restauré, naturellement ou par une régénération de burgu  ?

109 On pourrait considérer que les pasteurs conservent toujours un droit exclusif sur le substrat du burgu. Quand celui-ci disparaît, le milieu peut être cultivé (ou non) sous le contrôle des pasteurs qui gardent la possibilité de réaffecter cet espace au burgu. Il leur suffirait de faire cesser les labours et de laisser le burgu recoloniser le milieu, voire de mettre en oeuvre une régénération artificielle. Cette solution, qui peut paraître la plus adéquate, conférerait dans ce cas spécifique une maîtrise exclusive générale ou spécialisée, car une activité halieutique peut toujours reprendre, en étant ou non contrôlée par les pasteurs.

110 En termes d’emprise sur le sol, les pasteurs devraient recevoir une sécurisation afin de contenir l'expansion agraire et de pouvoir revenir sur des zones où le burgu retrouve des conditions propices à son développement. Mais comment répondre, lors de sécheresses, aux besoins des agriculteurs en terres cultivables ? Il ressort clairement que l’espace exploitable se rétrécit, ce dont tout le monde subit les conséquences au point de se retrouver sur... le même espace. Et l'usage d’un même espace pose un problème d’incompatibilité aux agriculteurs et aux pasteurs, quel que soit le type d'interdépendance qui les associe (troc lait/céréales, gardiennage des boeufs de labour, fumure des champs, etc.).

111 L’acuité de la problématique espace et ressource se manifeste ici dans toute sa dimension. Faut-il privilégier le droit sur l’espace ou sur la ressource ?

112 Il faut dans ce cas précis non pas réattribuer des droits (chose quasiment impossible ou difficile à conseiller), mais plutôt fixer dès le départ des règles qui prennent en compte la variation climatique de caractère contextuel et l’hydro-géographie du delta. On peut supposer que l’attribution de droits aux pasteurs ferait cesser ou du moins limiterait l’expansion agraire sur l’espace pastoral, en raison des compromis qui pourraient être négociés du fait d’une égalité de reconnaissance juridique. En effet, les rapports de force permettraient et contraindraient à des accords, des contrats ou des médiations. Une dialectique agro-pastorale ne peut se construire que sur une égalité de droits et, partant, sur une légitimation de tous les acteurs.

Dans l’affaire « Sotigi-Takaviabaka », le juge considère qu'une mare est l'accessoire des terres qui l’entourent. Le principal étant la bourgoutière, la mare, même asséchée, reste une composante de la bourgoutière. Le tribunal répond favorablement à la demande de chacune des parties en reconnaissant le droit exclusif (le juge parle de « propriété coutumière ») aux pasteurs peuls, et « l’usage », c'est-à-dire le droit d'exploitation, aux pêcheurs-agriculteurs bozo. Mais conforter les Bozo de Yimbere dans un usage excluant autrui, c’est leur accorder un droit d’exploitation des ressources, halieutiques et agraires, d’une façon exclusive, sans pouvoir autoriser aux étrangers l’accès à ces ressources. Le droit exclusif des Peuls se voit donc privé d’un de ses attributs capitaux, le droit de gestion des ressources. En raison de ce fait, le droit que le juge accorde aux Peuls ne leur est utile que dans le cadre de ressources qui ne sont ni halieutiques ni agraires. Comme il n’y a plus de burgu suite à la sécheresse et au labour du sol, les pasteurs se trouvent frustrés dans leur droit car ils ne peuvent pas entreprendre de régénérer le burgu, action qui serait constitutive d'un travail sur la terre (un droit agraire). Cette « propriété coutumière » s'avère donc inutile et, sans contrôle de l'exploitation, vidée de son contenu, à savoir la gestion intentionnelle.

113 Actuellement, la légalisation de droits attribués aux pasteurs générerait une reconnaissance de l’activité pastorale et ouvrirait ainsi la porte à des négociations et accords sur l’organisation de l’espace concerné.

114 Une véritable gestion viable à long terme de « l’espace-ressource » intéressé ne pourra se réaliser que par une légitimation des pouvoirs lignagers des pasteurs sur les bourgoutières organisées en leyde et des pêcheurs sur les pêcheries.

115 Enfin, on peut souligner l’opportunité d’une conférence régionale annuelle sur la gestion de l’environnement dans le delta, qui serait constitutive d’un forum sur la gestion des ressources naturelles renouvelables et la conservation des écosystèmes. Son objet consisterait entre autres à redéfinir, lors des crises entre exploitants, la vocation « ressource » de l’espace en cause afin de recréer une dynamique d’interdépendance entre systèmes d’exploitation. De plus, ce serait l’occasion d’élaborer et de faire adopter une planification de gestion écologiquement rationnelle avec les principaux intéressés. L’objectif serait d’asseoir la légitimité de chacun et d’offrir aux acteurs la possibilité de négocier sur un pied d’égalité.

Le défi de la délimitation de l'espace-ressource

116 Le principe de la délimitation des « espaces-ressources » existe depuis longtemps, que ce soit pour les pêcheries, les bourgoutières ou les agrosystèmes. Il existe d’autant plus que la pression anthropique sur les ressources est importante.

117 Actuellement, la nécessité de délimiter « l’espace-ressource » pour en maintenir l'existence devient parfois cruciale pour les pâturages et les infrastructures pastorales. Cette situation requiert semble-t-il un bornage, pratiqué par l'administration et recommandé par toutes les expertises (dont celle de Kintz et Traoré , 1993). En fait, on se rend compte que les bornes sont amovibles (elles disparaissent parfois) et que le coût de l’opération est élevé. Cependant, dans la mesure où le principe de la délimitation des espaces, dont le bornage n’est que la matérialisation, fait l’objet d’un consensus, le droit pénal devrait être mis en application pour sanctionner les dégradations et déplacements de bornes.

118 Cette matérialisation pose cependant problème dans le sens où elle fige une structure dynamique, parfois susceptible de fluctuations. Si nous prenons le cas des bancs de poissons poursuivis par des pêcheurs le long d’un cours d’eau, ceux-ci disposent d’un droit sur un banc précis. Cet exemple montre que la définition de la pêcherie ne peut être attachée à une délimitation précise ou immuable.

119 L’étude des rapports socio-cognitifs de l’homme envers le milieu montre que généralement celui-ci connaît très bien l’environnement dans lequel il vit, ainsi que son finage agraire : il en développe une représentation qui définit une « carte mentale » où les limites sont mémorisées. Si le bornage n’est certainement pas une entreprise inutile, la solution passe d’abord par une reconnaissance des droits des pasteurs et des pêcheurs et par leur intégration institutionnelle dans la gestion environnementale.

Des situations auxquelles le droit doit répondre

120 La problématique de la preuve de la titularité du droit exclusif reste essentielle pour le règlement des conflits liés à la revendication « d’« d’espaces-ressources». L’absence de cadastre et de propriété privée ne génère pas pour autant l’absence de modes de preuve. Ceux-ci sont de trois types : le témoignage, l’existence d’une contrepartie et une situation empirique consistant dans l’exercice de droits de façon permanente, continue et non équivoque.

121 Le principe de la première occupation fonde couramment le droit. Cependant, le lignage fondateur a aussi souvent pu voir ses droits confisqués par l'envahisseur et l’établissement d’un nouvel empire. Ainsi, la succession d’empires réorganisant le contrôle sur l’espace et l’accès à la ressource génère des revendications « empilées » de légitimités. Le droit ne peut pas prendre en considération les différents niveaux de stratification de pouvoirs, de telle sorte que la situation finale prévaudra (cf. l’affaire « Dakeole-Kobo ») afin d’assurer une stabilité juridique indispensable. Le juge considère que le droit traditionnel retient la première occupation ou la dernière conquête (cf. l’affaire « Jugal Bagi », jugement du TPI de Mopti n o 169 du 2/12/93). Ce choix sera d’ailleurs corroboré par une situation de fait qui se traduit par la durée d’exercice du droit et par sa transmissibilité. Il arrive parfois au juge de s’en tenir au seul statu quo lorsqu’il préfère ne pas remettre en cause une situation acquise.

122 L’acquisition d'un droit exclusif peut se justifier par la durée d’exploitation et de gestion de la ressource. Mais un très long prêt doit-il donner lieu à une transformation en don, si telle n’était pas l’intention des parties au début ? Le prêt d’une terre, qui n'est pas une amodiation, ne donne pas systématiquement lieu à une contrepartie symbolique, c’est-à-dire une reconnaissance annuelle du prêt, surtout entre familles du même village. Dans ce cas, les témoignages vaudront preuve. Cependant, avec le temps, les témoins peuvent disparaître ou s’opposer, comme certains conflits fonciers le montrent. Face à un prêt hérité, on pourrait imaginer que le juge se réfère à la durée d'exploitation qui, au bout de vingt ans par exemple, vaudrait disposition du droit exclusif s’il n’existe aucune contrepartie.

123 La clarification des règles de fond est un besoin exprimé ouvertement par les magistrats, l’administration, les diverses organisations et les populations. Ces règles juridiques font référence pour une application quotidienne, afin que chacun sache où se limitent ses libertés. L’impossibilité fréquente d’appliquer le Code civil (français) et les multiples interprétations des règles traditionnelles ou leur méconnaissance traduisent une situation délicate aboutissant à un droit positif qui n’est pas vraiment « posé ». Cette situation « de la pratique » développe un système de rapports de force entre acteurs jouant d’un système juridique biaisé.

124 La réalité se traduit par une série de dysfonctionnements qui ont pu être relevés dans les conflits sur les ressources. Le droit doit répondre à ces situations très concrètes (nous proposons quelques réponses, présentées dans le tableau V annexe IV).

125 La présentation des dysfonctionnements est conjointe avec les solutions juridiques exprimées sous forme d’un tableau synthétique. La complexité du système deltaïque engendrée par la multifonctionnalité de l’espace ne peut se satisfaire d’incertitudes qui maintiendraient la situation d’aporie constatée. Il est nécessaire de reconnaître la notion « d’espace-ressource » ainsi que les légitimités traditionnelles. Il ne s’agit pas pour autant d’opter pour un retour en arrière, mais de construire un régime juridique répondant au besoin d’une gestion viable à long terme. Enfin, l’existence d’intérêts opposés, qui créent un contexte de concurrence entre les systèmes d’exploitation, les types de prélèvements et au sein de chacun d’eux, oblige non seulement à rendre cohérents des droits et des obligations contenus dans les maîtrises foncières, mais aussi à organiser des négociations au sein de forums, qui permettent d’aboutir à des compromis et des conciliations.

126 Cet ensemble de situations nous conduit à justifier les solutions prônées en proposant un système juridique moderne ancré dans les réalités locales. Il n’est pas impossible de fusionner dans un droit moderne un fondement traditionnel, racines de la société, avec une construction novatrice. Le droit de la « common law » le prouve : il repose sur les coutumes et les usages mais aussi, et de plus en plus, sur des textes.

127 En effet, ce système est constitué au départ de principes qui découlent des manières de faire qui assurent la reproduction sociale et qui sont constitutives de la coutume. La common law reconnaît d'autant plus cette dernière que des décisions judiciaires se fondent sur sa violation. Le juge se réfère aux règles de la pratique, à un précédent ou aux textes s’il y en a, car ce système n’exclut pas l’existence d’un droit élaboré par le législateur. Le droit ainsi formé est souvent flexible, car il est adapté aux changements de la société, grâce à l’importance accordée au droit prétorien, qui consiste dans l’interprétation effectuée par les tribunaux.

Proposition de l'organisation d'une cogestion environnementale

128 La cogestion des milieux et des ressources naturelles renouvelables consiste à partager leur administration entre différents acteurs, au travers de droits cantonnant chacun dans une aire de responsabilité et d’intérêt. La Stratégie mondiale de la biodiversité définit la cogestion comme « le partage du pouvoir et des responsabilités entre le gouvernement et les utilisateurs de ressources » (1992 : 92, « Action 35 »). La notion de gouvernement recouvre les pouvoirs déconcentrés de l’État et les collectivités territoriales décentralisées.

129 La responsabilisation des populations envers la pérennité des ressources naturelles et la préservation de la biodiversité suppose leur engagement dans une dynamique de cogestion permettant la mise en œuvre d’une gestion intentionnelle de l’environnement. Nous partons du constat qu’aux « espaces-ressources » se superposent des espaces géopolitiques d’échelles différentes qui impliquent autant de niveaux de décisions. À chacun de ces niveaux, les gestionnaires de base – les titulaires de la maîtrise exclusive et spécialisée, dans notre proposition – doivent être associés à la maîtrise intentionnelle et constituer des pôles de consensus, notamment par le biais de forums sur la gestion de l’environnement.

130 En effet, deux types d’espaces se dégagent de la réalité foncière et environnementale : l’espace géopolitique territorialisé, qui est continu et permanent ; l’espace-ressource, qui est souvent discontinu et impermanent. Le territoire géopolitique correspond à une aire de pouvoir exercé par une communauté rurale (village, hameau, campement) par une collectivité territoriale décentralisée (commune rurale, cercle, région) ou par un pouvoir administratif déconcentré (l’arrondissement, le cercle ou le département, la région). Ainsi, un territoire villageois contient-il plusieurs « espaces-ressources » qui se traduisent par un foncier agraire, pastoral, halieutique, forestier ou cynégétique. Ceux-ci sont d’ailleurs susceptibles de déborder un territoire villageois pour en recouvrir plusieurs. Les niveaux géopolitiques ne correspondent pas de façon symétrique aux « espaces-ressources », car ces derniers sont enchevêtrés et peuvent déborder la sphère d’une collectivité. Par exemple, le maître des pâturages intègre les trois niveaux géographiques selon la dimension de son leydi et également en raison de la dynamique d’ensemble de la transhumance. Le maître des eaux quant à lui se retrouve à un niveau inter-villageois et intercommunal. Dans ce contexte de superposition d’espaces se conjuguent une série de droits qui présentent plus ou moins de compatibilité. Ce peut être par exemple le cas du jowro, maître des pâturages, confronté aux villages dans lesquels se trouvent les pâturages lignagers dont il assure la gestion. Le chef de village ira jusqu’à revendiquer pour le cheptel de la communauté d’habitants le libre accès aux bourgoutières qui se situent sur le terroir villageois.

131 Cette imbrication des « espaces-ressources » et des espaces administratifs ou des collectivités locales implique une cogestion, en raison du fait que les niveaux de prise de décision et d’action se répartissent entre différentes échelles, selon les rapports homme/milieu et homme/homme. Le patrimoine local va donc s’insérer dans une gestion régionale, ensuite nationale, puis internationale. Cette gestion emboîtée se traduit juridiquement par une stratification allant du droit international au droit local (ou vice versa). L’intérêt d’un tel schéma est de correspondre aux réalités à dimensions variables (du local au global), parce que chaque échelle a sa réalité. Il est aussi des dynamiques de ressources (halieutique, avienne et pastorale) qui se rapportent à plusieurs niveaux de gestion, par la migration et la transhumance. La gestion patrimoniale se dissocie en un rapport homme/milieu/homme par « l’espace-ressource » et un rapport homme/homme (politique) par l’espace géographique territorialisé. L’originalité de ce schéma consiste à mettre en évidence l’existence d’une imbrication de droits dans une imbrication d’espaces, permettant de rendre effective une gestion intentionnelle.

132 Vis-à-vis du milieu, les groupes territorialisent leurs espaces d’action par l’exercice de droits fonciers environnementaux. La maîtrise exclusive en constitue l’instrument juridique. L’accès d’autrui n’en sera pas interdit pour autant mais organisé, réglementé et négocié.

133 « L'espace-ressource » se territorialise donc à travers une relation de pouvoir sur l’espace. Cette territorialisation prend la forme habituelle de « finages-ressources » : finage halieutique (la pêcherie), finage agraire et finage pastoral (le leydi ). Dans le delta, le finage forestier et le finage cynégétique ne se particularisent pas par rapport au terroir villageois. Le leydi est soumis à une délimitation spatiale supplémentaire en son sein même. En effet, le lignage se constitue de sous-lignages (segments de lignage), dans lesquels chaque troupeau se rattache à sa bourgoutière (cf. supra ). Le finage pastoral est spécifique car il se rattache à une dynamique de transhumance qui implique la présence de voies d’accès, de gîtes d’étape, de zones d’attente, de points d’eau pour abreuver les animaux et de terres salées. Toute cette infrastructure pastorale est intrinsèquement liée aux espaces pastoraux inondés et exondés, qui n’en sont que le prolongement.

134 « L'espace-ressource » se réfère à un niveau de gestion intrinsèque à la ressource, où la gestion est opérationnelle et polarisée sur une ressource considérée. Le niveau politique ou territorial se trouve au-delà, et correspond à une gestion qui prend en compte les interrelations qui doivent être ménagées entre systèmes d’exploitation ; il justifie ainsi une sphère géographique territorialisée. L’imbrication reste harmonieuse et complémentaire tant que les pouvoirs de chacun sont clairement définis et respectés.

135 Ainsi pourraient être mis en place deux niveaux de gestion : celui de « l’espace-ressource » et celui de l’espace correspondant à la collectivité territoriale. Les acteurs locaux intervenant sur la « ressource » devraient être intégrés dans le niveau politique. Afin d’associer les autorités locales légitimes au processus décisionnel, il serait envisageable de les insérer dans des comités de gestion. Les échelles d’intervention de ces derniers iraient de la commune rurale à la région, selon la dynamique pastorale (comités intervillageois, intercommunaux et d’intercercles) ou halieutique (villageois et intervillageois). L’activité cynégétique pourrait également donner lieu à des comités de gestion associés à différentes échelles. Au niveau du terroir villageois, le finage agricole (espace parcellisé) resterait sous la maîtrise des lignages, du maître de terre ou du chef de village. Le village pourrait à son niveau, par exemple, instituer une association pour la surveillance « de la brousse » (du couvert arboré). La figure 7 présente les relations de pouvoirs possibles dans le cadre de la décentralisation.

136 Une intersection existe entre l’espace géographique ou géopolitique, continu et permanent, et l'espace-ressource, souvent saisonnier et parfois discontinu. Elle se situe au sein du terroir villageois et peut prendre la forme d’un espace forestier ou cynégétique. Nous n’avons pas intégré le cas particulier de l’espace pastoral géré par le village pour les vaches laitières, le hariima, car il n’est pas présent dans tous les villages.

Figure 7 - L'organisation d’une cogestion environnementale : les relations de pouvoir possibles dans le cadre de la décentralisation.

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137 Le tableau 26 présente de façon synthétique le type de fonctionnement préconisé dans le cadre de la décentralisation malienne. Il apparaît que le processus de résolution des conflits fait l’objet de tentatives de solutions amiables effectuées par l’entremise de médiateurs légitimes aux yeux des parties et ce, préalablement à l’intervention du juge.

138 La réglementation relative aux ressources et aux écosystèmes ne peut se plaquer sur une réalité locale en l’absence d’un processus d’internalisation de ces règles, qui se réaliserait par la maîtrise intentionnelle. Rappelons que cette dernière ne se restreint pas à un aspect réglementaire mais a vocation à créer des rapports consensuels pour une gestion environnementale plus incitative que répressive.

139 Il ne s’agit pas ici pour l’État de déléguer la gestion des ressources naturelles renouvelables, ni de la prendre en charge, mais de l’inciter et de l’encadrer. La coviabilité des systèmes d’exploitation avec les écosystèmes n'est susceptible de perdurer qu’en intégrant dans les pratiques une logique environnementale. Cependant, la mise en application d’un discours, aussi construit soit-il, ne s’accomplit pas de facto car il nécessite un socle juridique et une armature institutionnelle. Si la décentralisation offre l’organisation institutionnelle, il reste à penser la construction d’un système juridique fonctionnel ne reposant plus sur une logique d’appropriation foncière. C’est la raison pour laquelle nous pensons nécessaire de permettre et de favoriser le développement d'un droit local foncier environnemental, exprimé au sein de chartes ou conventions, intégré dans des cadres régional et national.

Tableau 26. - Espaces des pouvoirs des acteurs préconisés par rapport aux ressources et aux écosystèmes.

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Derrière le commentaire du texte de droit toujours indispensable et l'identification des objectifs poursuivis par le législateur, l'un et l'autre bien connue, il reste à dégager le sens des politiques foncières. A travers les choix de procédure juridiques et les modalités d'affectation de l'espace selon diverses activités économiques, quel type de société le droit foncier est-il en train de façonner en Côte d'Ivoire, et quelle limite rencontre-t-il dans son remodelage ? Le point de vue de l'anthropologie juridique permet de découvrir derrière les textes et les pratiques juridiques le système de pensée qui les produit, et de tenter de répondre aux questions posées. La résistance des droits fonciers anciens ignorés puis dénaturés, les divers blocages juridiques et sociologiques posent le problème de la responsabilité de l'état et de ses principaux acteurs dans la politique foncière mise en œuvre dans le modèle de développement choisi et de ses distorsions. Le règlement jurisprudentiel et négocie des conflits fonciers se heurte à des impasses. Une reforme foncière s'avère urgente en Côte d'Ivoire. Elle devra se fonder sur les dynamismes fonciers locaux, les pratiques de négociation foncière et les aspects positifs des droits fonciers autochtones.

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Les enjeux fonciers vus d’en bas : quand les mobilisations des propriétaires privés se font citoyennes

Ce dossier porte sur les propriétaires fonciers et leur pouvoir d’intervention dans la construction de la ville. Les conflits que la propriété foncière suscite sont analysés du point de vue des populations propriétaires, occupantes ou voisines dans leur relation avec les autres parties-prenantes du processus d’urbanisation, en premier lieu avec la puissance publique, mais aussi avec d’autres acteurs moins connus qui peuvent conduire les changements. Les formes que prennent les relations sont décryptées dans des situations originales. Les conséquences de ces relations sur le processus d’aménagement lèvent le voile sur des influences sous-évaluées et replacent les jeux de pouvoirs dans la dynamique socio-spatiale de la fabrique urbaine.

This issue deals with land properties and analyses the land ownership power on the construction of the City. The conflicts initiated by land ownership are analyzed from the point of view of the inhabitants and their relations with the other stakeholders involved in the urbanization process. Public authorities are concerned but less known actors can also lead the changes. Relationships are decrypted in original situations. The consequences of these relations on the planning process, alliances and power plays are considered in the socio-spatial dynamic of urban fabrics.

Entrées d’index

Mots-clés : , keywords: , texte intégral, introduction.

  • 1 Ce numéro rassemble des articles émanant de jeunes chercheurs, membres du Réseau des Jeunes Cherch (...)

1 Ce numéro propose de contribuer au développement de la recherche sur les propriétaires fonciers, acteurs mal connus de la construction urbaine, et vise à renseigner leur pouvoir d’intervention dans la fabrique urbaine 1 .

2 Les mécanismes de la production urbaine ont évolué dans le contexte d’incertitude macro-économique des dernières décennies et se complexifient en accordant une place plus importante aux entrepreneurs et aux investisseurs, mais aussi en intégrant une participation accrue de la société civile et des citoyens. Ces acteurs ne sont pas « nouveaux ». Suivant une tendance qui se renforce, la sphère privée devient partie prenante des décisions, en contribuant avec la puissance publique aux orientations d’aménagement, voire en prenant l’initiative des projets d’aménagement. Les outils de maîtrise d’ouvrage publique laissent place à davantage de négociations, parfois ratifiées dans des accords de coopération entre le secteur privé et le secteur public, comme les « projets urbains partenariaux » (Menez, 2008), et à des modes de pilotage plus managériaux tels que le « mode projet » et plus interactifs comme le démontrent les « appels à projet innovant » (Béhar, Bellanger et Delpirou, 2018). De nombreux travaux interrogent l’interférence des objectifs financiers du secteur privé dans ces montages (Aalbers, 2019 ; Boulay, 2019). Ils accordent souvent peu d’attention aux citoyens, « petits propriétaires », habitants, riverains. Ceux-ci devancent parfois les processus de concertation publique pour être force de proposition dans les projets qui, dès lors, se transforment en une coproduction entre de multiples acteurs (Guiheneuf, 2013).

3 La pierre angulaire du processus d’aménagement et l’enjeu de réussite de ces coproductions portent sur l’accès au foncier. La disponibilité et le prix du foncier sont au cœur des stratégies publiques en faveur de la construction de logements ou de la préservation des terres naturelles. Ils sont systématiquement traités dans les lois et règlements récents et continuent d’alimenter les débats législatifs. Les choix politiques sont régulièrement interpelés par la société civile comme l’illustre, entre autres, la surtaxe sur les terrains non bâtis constructibles, qui a dû être reconfigurée à la suite des plaintes insistantes des propriétaires (Guelton et Le Roux, 2016). Le rôle du foncier en aménagement est parallèlement réinterrogé par les chercheurs dans un contexte de tensions financières et immobilières renforcées par la crise économique de 2008. D’un côté, les recherches se penchent sur les difficultés ou les blocages liés à la propriété foncière, à sa détention et à son coût, tout particulièrement dans les processus de renouvellement urbain. Des travaux ont évalué les solutions proposées par différents montages partenariaux, en coopération formalisée ou informelle (Linossier et Verhage, 2009 ; ORF, 2016). D’un autre côté, les attentes liées aux valeurs foncières et à leurs fluctuations sont à l’origine d’une financiarisation du foncier mise en évidence dès les années quatre-vingt-dix (Renard, 2005) et désormais bien étudiée et caractérisée dans différents contextes internationaux (Denis, 2015 ; Guelton, 2018). La figure du propriétaire reste malgré tout très mal connue, même si quelques stratégies ont été identifiées par un petit nombre de chercheurs (Renard, 2015 ; Landriève, 2016). Des stratégies originales ont été identifiées en Asie ou au Canada. Les ménages achètent des terrains et immeubles dans les pays voisins, sans les proposer à la location pour obtenir des revenus à court terme, mais pour sécuriser un capital sur le long terme (Aveline, 2015 ; Tillemans, 2015). Ces comportements préfigurent des attitudes françaises qui émergent avec la montée des incertitudes sur la protection de l’épargne, de la retraite, le coût de la fin de vie… Le rôle des investisseurs financiers sur le marché foncier retient également l’attention (Aveline, 2017 ; Guironnet, 2016 ; Nappi-Choulet, 2013). Les gestionnaires de fonds de placement achètent des terrains en milieu urbain pour les aménager, suivant des logiques de rentabilité comparée entre différents supports d’actifs à l’échelle internationale, peu soucieux du développement urbain ou social que leurs placements génèrent. Ces différents acteurs sont parties prenantes de nombreuses opérations d’aménagement et constituent un maillon incontournable des logiques d’intervention des autres acteurs de la chaîne de l’aménagement, aménageurs et promoteurs. Ils favorisent certains lieux et orientent la nature des projets et leur prix (Guelton, 2018). Les collectivités locales, elles-mêmes, participent indirectement au processus, lorsqu’elles mettent des terrains à disposition de l’aménagement et lorsque leurs politiques d’équipement créent une nouvelle attractivité résidentielle et entraînent une hausse des prix. Les systèmes d’influence, de négociation et d’arbitrage entre ces différents acteurs aux objectifs particuliers interpèlent la puissance publique : comment atteindre les objectifs sociaux, environnementaux ou même politiques en misant sur les nécessaires ressources privées, foncières et financières ? Comment réguler les arbitrages des propriétaires pour permettre une mise à disposition des terrains conforme aux intérêts publics ? Comment transférer – « récupérer » comme le défend Henry George (1887) – une partie de la hausse des prix fonciers générée par l’investissement public et éviter qu’elle ne soit pas intégralement privatisée ?

4 L’objet de ce numéro est d’analyser des cas de mise en friction du droit de propriété avec un projet public, en centrant le regard sur les propriétaires privés, individuels ou regroupés en associations, interpelés à l’occasion de l’aménagement urbain.

5 En France, les réflexions menées en 2011 dans le cadre des groupes de travail sur l’urbanisme de projet mis en place par Benoist Apparu, alors ministre du Logement, ont relancé l’intérêt pour le foncier comme levier des politiques publiques d’aménagement. Plusieurs rapports officiels ont depuis porté le sujet au débat public (Pillet et al. , 2013). De façon récurrente, ils remettent en question la propriété individuelle et évoquent les difficultés à l’articuler avec les besoins collectifs (Figeat, 2016 ; Petel et Potier, 2018 ; Lagleize, 2019). Face à l’impératif contemporain d’une urbanisation dense et économe, la panoplie des outils pour inciter les propriétaires à agir dans le sens des intérêts collectifs est vaste : planification, fiscalité, acquisition foncière, procédures et contentieux. Des modalités juridiques de mobilisation foncière ont été « inventées », ou revisitées, comme la création des offices fonciers solidaires opérant avec le bail réel solidaire ou la société foncière réalisant un portage foncier de longue durée. Une valorisation foncière adaptée soutient de nouvelles relations entre le propriétaire et l’usager du sol. Les méthodes restent directives et peu proactives. Elles ont en commun de provoquer les propriétaires dans un processus top-down . Les attentes des propriétaires ne sont que peu envisagées lorsqu’il s’agit de contribuer aux réserves foncières ou à la transformation des sols. Les occupants des lieux, les riverains ou les passants sont rarement interrogés sur les options du renouvellement urbain. Même s’ils sont protégés par un statut de locataires, une servitude d’usage, une loi ou un règlement (comme la loi n o  75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d'habitation), ces acteurs sont rarement parties prenantes des transactions menées lors d’opérations urbaines. Les uns et les autres sont régulièrement présentés par les professionnels de l’aménagement comme des empêcheurs de la fabrique urbaine, alourdissant son coût et ses délais (ORF, 2016). Ils sont régulièrement perçus comme des individus spéculateurs pour les uns, ou partisans pour les autres, favorisant l’immobilisme et la rétention foncière contre les intérêts communs (Renard in Guelton, 2013).

6 Des postures différentes sont pourtant à mettre en évidence. Les motivations des propriétaires ne vont pas toujours contre les intérêts collectifs. Dans ce dossier, tant l’analyse de Jean-Baptiste Chabert, qui porte sur une commune périurbaine du Var, que celle de Vincent Le Rouzic, sur l’expérience du Cooper Square à New York City, rendent compte d’interactions soutenues. Le premier observe une collectivité locale allant au-devant des propriétaires, proposant des arbitrages et des alliances aux formes variables pour finaliser leurs projets. Le second s’intéresse aux coopératives et à l’expérience du Community Land Trust, mobilisant les habitants-propriétaires « par le bas » dans un processus bottom–up plus ou moins contrôlé.

7 De leur côté, d’autres individus de la société civile s’impliquent aussi dans les projets politiques, en s’opposant, parfois, aux règles de droit. Romain Melot met la focale sur les contentieux soulevés par des riverains au sujet des permis de construire, dans le sud de la France. En examinant les conflits ou les contradictions dont ces contentieux rendent compte, en analysant leurs argumentaires, l’auteur révèle l’importance et l’objet de l’expression individuelle dans la construction urbaine. Il souligne aussi comment ces comportements peuvent avoir un impact sur la décision publique.

8 Les initiatives des habitants prennent aussi des modalités collectives, élaborées spontanément ou sous l’arbitrage de tiers. Les articles de Marion Serre et de Njaka Ranaivoarimanana interrogent précisément ces actions collectives. Née d’un conflit initial sur la remise en service d’une voie ferrée désaffectée à Marseille, la mobilisation des habitants étudiée par M. Serre va dépasser le stade de la revendication pour aboutir à une coopération avec les institutions publiques et ce, en vue d’accompagner l’objectif public collectif dans une « stratégie citoyenne ». N. Ranaivoarimanana, quant à lui, se penche sur les marchés fonciers à Tananarive et sur la façon dont des règles informelles sont utilisées pour pallier les défaillances des procédures formelles. Dans ces deux articles, les individus, propriétaires ou occupants les lieux, s’organisent spontanément pour contribuer à la construction des politiques publiques d’aménagement foncier dès le début du projet, souvent même dès leur conception. Des agents intermédiaires participent à ces processus : les motivations du « Mpanera tany » à Madagascar, caractérisées par N. Ranaivoarimanana, ne peuvent-elles pas faire écho à d’autres attitudes observées par J.-B. Chabert dans le contexte périurbain français ?

9 Trois axes structurent et traversent les articles qui composent ce dossier : l’appropriation du droit foncier par les habitants, le processus de mobilisation de ces habitants à des fins collectives et citoyennes, et le rôle joué par des intermédiaires dans les négociations et la résolution des conflits.

L'appropriation du droit foncier par les habitants : un levier pour combler les inégalités de pouvoir

10 L'organisation de l'espace foncier est réalisée par les pouvoirs publics, en amont des opérations d’aménagement, par l'instauration de règles et la réalisation de documents d'urbanisme. Des choix politiques sont faits dans le but de protéger et de conserver les ressources ou de convertir et aménager des terrains. Ces outils juridiques sont pensés pour ordonnancer une gestion collective de l’espace, pour structurer l'action privée et l’inciter à contribuer à certains objectifs publics. Sur le terrain, les limites de la propriété ne sont pas toujours claires. Dans certains contextes, des formes d'appropriation individuelle ou collective se constituent à partir d’opportunités, créent de nouveaux modes d’intervention sur l’espace et, à moyen terme, prévalent au droit. L’article de M. Serre et celui de N. Ranaivoarimanana traitent de ces pratiques habitantes et de leur contribution à l’urbanisation.

11 M. Serre les identifie à Marseille sur des espaces résiduels d’opérations d’aménagement sur lesquels s’exercent des actions hors norme. Elle nomme ces espaces des « tiers fonciers ». Elle présente le processus de mobilisation des habitants, leurs résistances aux décisions initialement prises par les pouvoirs publics et leurs marges de manœuvre. Elle révèle chez les habitants des intérêts qui ne se cantonnent pas seulement à leur propriété individuelle mais s’ouvrent sur l’usage collectif de leurs biens. La mise en évidence des dysfonctionnements du droit pose la question de la légitimité des processus d’intervention. Quels rapports au sol entretiennent les acteurs privés impliqués et comment s’emparent-ils des réglementations ? Dans quelles circonstances et selon quelles modalités les normes sont-elles mobilisées pour répondre aux intérêts privés ? Le résultat de ces enquêtes souligne comment les conflits peuvent donner naissance à un nouveau pouvoir des associations et des habitants, à côté des prérogatives institutionnelles et professionnelles.

12 De son côté, N. Ranaivoarimanana expose le cas de Madagascar, où l’appropriation foncière informelle, basée sur un système social local dominant ou ordonnancé par le biais d’opérateurs à l’affût d’opportunités d’aménagement, est récurrente. Il montre comment se confrontent le marché officiellement administré par les pouvoirs publics et la demande des habitants portant sur le remblaiement de zones inondables, la construction ou la vente de terrains. Cette dernière s’impose finalement, en dépit des règles officielles, par ailleurs complexes et peu adaptées, sous l’influence de stratégies individuelles originales. Une organisation socioprofessionnelle se structure autour de la pression des habitants et constitue un pouvoir alternatif majeur. Elle pourrait poser les bases d’un nouvel « ordre juridico-social » accepté et opérant, même si la question des bénéficiaires se pose

Conflits et négociations foncières : l’organisation citoyenne à des fins collectives

13 Dans ses missions d’aménagement urbain, la puissance publique compose avec les droits des propriétaires qui peuvent être force de blocage. Elle est également interpelée par les riverains parfois rassemblés dans des associations d’habitants qui s’engagent au nom de la protection du cadre de vie (cf. Blais, Gillio et Ion, 2001). V. Le Rouzic confronte le droit de propriété et le droit à l’appropriation à l’aune de différents cadres théoriques. Il reprend en particulier les analyses d’Henri Lefebvre et de David Harvey sur le droit à la ville pour discuter la légitimité de ces processus alternatifs dans la production de l’espace. Pour ce faire, il présente une forme originale de mobilisation citoyenne à New York qui a conduit à réviser la planification initiale et à arbitrer en faveur de la construction de logements abordables. Il rejoint ainsi certaines conclusions de M. Serre sur la capacité de la mobilisation des habitants à produire des innovations dans la fabrique urbaine. L’exemple américain introduit une nouvelle forme de propriété, le Community Land Trust , qui propose un arbitrage entre l’accès au logement par la propriété individuelle et la garantie de droits collectifs de gestion par une institution collective ayant pour but d’atteindre un objectif social, ici le maintien d’une offre de logements à prix abordables dans un contexte urbain où la pression foncière et immobilière est très forte.

14 La participation « organisée » est souvent portée par des attentes qui se cristallisent dans les conflits. Les pouvoirs conférés au foncier sont multiples et parfois contradictoires : protection environnementale, héritage culturel, organisation sociale, rendement financier... Les recours contentieux dont R. Melot rend compte dans le département du Vaucluse sur la période de 2012 à 2017 permettent d’en cerner les logiques. Les propriétaires comme les riverains d’un projet disposent d’une marge de manœuvre pour influencer les constructions dans le cadre des règles d’urbanisme. Constitués parfois en association, mais intervenant le plus souvent de façon non coordonnée, ils peuvent ainsi réguler des décisions publiques afin de préserver leurs droits ou leurs usages et éviter les atteintes à leur cadre de vie : les nuisances visuelles et sonores, la consommation d’espaces verts… L’analyse de R. Melot revient ainsi sur les idées reçues se rapportant à la figure du propriétaire égoïste et spéculateur, en analysant statistiquement l’origine des recours, leur spatialité, leur objet. Au-delà des effets de blocage largement mis en avant par les opérateurs, l’analyse de ces recours apporte une réponse circonstanciée à la question du rôle de la mobilisation des habitants dans les choix de construction urbaine.

La médiation foncière : quand des intermédiaires renouvellent les pratiques d'aménagement

15 Dans la production urbaine, la chaîne d'acteurs œuvrant pour la transformation des sols est longue (Searle, 2014), des pouvoirs publics aux usagers. Le temps et les efforts consacrés à l’établissement d’accords et les coûts de transaction sont souvent à l’origine de nouvelles organisations, plus intégrées ou plus centralisées. Dans cette chaîne, certaines personnalités se posent, volontairement ou involontairement, comme des « médiateurs ». Elles proposent des arrangements entre acheteurs et vendeurs, aménageurs et promoteurs ou encore élus et propriétaires. Cette médiation foncière n'est cependant pas toujours une activité organisée, cadrée et déclarée. À côté des agents immobiliers ou des promoteurs, d’autres intermédiaires, opérant de façon plus spontanée ou même incongrue, sont identifiés dans les articles qui composent ce dossier. N. Ranaivoarimanana, dans le cas malgache, décrit l’activité des Mpanera tany , leur position sociale et le réseau qu’ils animent. Il explique comment le médiateur conforte et structure un pouvoir réglementaire défaillant. De son côté, dans l’exemple français, J.-B. Chabert rend compte d’une médiation qui s’oppose au pouvoir réglementaire. Le médiateur est ici une personnalité politique. Sa trajectoire, sa stratégie personnelle de conquête du pouvoir politique tire profit des rapports de force entre les différents groupes sociaux et les agents administratifs qualifiés de « technocrates ». Dans les deux cas, la prise en compte des coalitions d’habitants présente aussi un risque de débordement. Les capacités d’organisation que les groupes d’intérêts fonciers déploient, comme les tensions qu’ils provoquent, peuvent fragiliser les médiations et mettre en échec les stratégies personnelles.

16 Des Suds aux Nords, les initiatives citoyennes, associées, ou stimulées selon les cas par des intermédiaires fonciers, renouvellent les pratiques publiques de la construction de la ville. Les confrontations entre les pouvoirs publics et la société civile ne porteraient-elles pas les germes de coopérations inattendues, durables, au profit d’intérêts collectifs partagés ?

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1 Ce numéro rassemble des articles émanant de jeunes chercheurs, membres du Réseau des Jeunes Chercheurs du Foncier. Ce réseau, soutenu par le Lab’Urba de l’université Paris-Est et l’UMR ESPACE de l’université d’Avignon, a pour objet de réunir les doctorants et jeunes chercheurs confrontés aux questions foncières afin de mettre en commun leurs connaissances théoriques et méthodologiques à partir d’expériences diverses et d’analyses transdisciplinaires ( https://rjcfoncier.hypotheses.org/ ).

Pour citer cet article

Référence électronique.

Sonia Guelton et Roxane de Flore , « Les enjeux fonciers vus d’en bas : quand les mobilisations des propriétaires privés se font citoyennes » ,  Métropoles [En ligne], 27 | 2020, mis en ligne le , consulté le 17 mai 2024 . URL  : http://journals.openedition.org/metropoles/7327 ; DOI  : https://doi.org/10.4000/metropoles.7327

Sonia Guelton

Réseau des Jeunes chercheurs du foncier sous l’égide du Lab’Urba, université Paris-Est – UMR Espace, Université d’Avignon), Lab'Urba, université Paris-Est

Roxane de Flore

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Droit foncier

Professeur Samira Benboubker

Chapitre 1: Introduction au droit foncier

Les axes de travail de cette première séance introductive au droit foncier :

• Approche originelle: présentation du foncier au Maroc • La définition du foncier: Quelles sont les différentes formes de propriété foncière? Quid d’une homogénéité foncière ? • La spécificité du droit foncier au Maroc • L’émergence de nouvelles formes foncières

1§. La définition du droit foncier

L’absence d’une définition dans les grands ouvrages de lexiques juridiques du droit foncier traduit la complexité de cette matière qui repose sur des réalités multiples et des temps différents. L’ouvrage de Paul Décroux ne contient pas définition mais simplement un constat de la dualité de la législation marocaine en matière foncière entre le droit musulman et le droit moderne instauré lors du Protectorat. Il est important de comprendre le foncier en s’intéressant à son étymologie.

Le FONCIER est synonyme de TERRIEN, qui est rattaché à la terre. Le foncier qui constitue un bien-fonds. La propriété foncière a pour synonyme le foncier.

Il s’agit de l’ensemble de règles qui régissent les rapports qui existe entre des individus ou des groupes relativement aux terres. Ces règles définissent la répartition des droits de propriété sur les terres, les modalités d’attribution des droits d’utilisation, de contrôle et de transfert des terres, les modalités et les limitations correspondantes, selon une définition de la FAO. Le propriétaire foncier est celui qui possède un fonds, des terres. Le foncier est relatif à un bien-fonds. Par exemple: un crédit foncier est un prêt destiné au financement d’un bien-fonds. L’impôt foncier est une taxe sur un bien foncier, on parle également de taxe foncière.

2§. L’histoire du droit foncier marocain

A. le foncier au maroc avant l’islam.

Avant l’avènement de l’islam au Maroc, la propriété foncière était généralement tribale, où les terres étaient affiliées à des tribus groupements d’individus. Dans ce système, la propriété foncière tribale se concentrait principalement sur l’agriculture sédentaire, avec des limites naturelles telles que des oasis, définissant clairement les propriétés. Le Professeur Bouderbala Nejib explique « La terre de tribu, alors, n’était pas une propriété mais un territoire, espace politique dont l’étendue et la localisation dépendaient du poids démographique de la capacité militaire du groupe et des traités passés avec les groupes voisins. La terre n’était pas rare : elle était à la tribu pour autant que la tribu avait des hommes pour l’occuper et qu’elle n’avait pas rencontré d’autres groupes plus puissants dans son expansion. ( Bouderbala N. Les systèmes de propriété foncière au Maghreb. Le cas du Maroc. In : Jouve A.-M. (ed.), Bouderbala N. (ed.). Politiques foncières et aménagement des structures agricoles dans les pays méditerranéens : à la mémoire de Pierre Coulomb. Montpellier : CIHEAM, 1999. p. 47-66.)

B. Période pré-coloniale avant le protectorat

La terre était principalement considérée comme un bien commun destiné à être mis en valeur, exploité. On parlait de terres collectives qui étaient régies par les coutumes locales. La propriété immobilière privée, connue sous le nom de “MELK”, ainsi que les droits réels qui en. découlaient, étaient uniquement établis par des actes notariés musulmans appelés “adoulaires”.

En parallèle, il existait des terres d’État, composées de terres sans propriétaire, abandonnées ou confisquées. Ce domaine constituait l’instrument principal de la politique foncière de l’État.

3§. La législation coloniale en matière foncière

Sous le protectorat, l’accent était mis sur la prise de contrôle des terres par les colons. Deux groupes se sont formés : ceux qui soutenaient une appropriation sans aucune réglementation, souvent qualifiée d'”installation sauvage”, et d’autres colons cherchant une acquisition plus durable, axée sur une perspective à long terme. Le législateur français a finalement opté pour une solution intermédiaire entre ces deux groupes.

Le compromis adopté se présentait de la manière suivante : • La protection des terres collectives • La consécration du système de l’immatriculation foncière

A. La protection des terres collectives

Un dispositif de protection des «terres indigènes» fut mis en place (protection des terres de tribu, législation sur le «bien de famille»). L’article 10 du dahir du 27 avril 1919 sur les terres collectives est une remarquable illustration de ce compromis : «La propriété des terres collectives ne peut être acquise que par l’État ; cette acquisition ne peut avoir lieu qu’en vue de créer des périmètres décolonisation».

Le Dahir du 27 avril 1919 confirmera le caractère inaliénable des terres collectives d’une part tout en instaurant la tutelle de l’Etat sur les terres appartenant aux collectivités. « Dahir du 27 avril 1919 organisant la tutelle administrative des collectivités indigènes et réglementant la gestion et l’aliénation des biens collectifs, Bulletin officiel du 28 avril 1919, p 375 ». De plus, des opportunités considérables ont été offertes aux Européens et aux colons pour acquérir des terres, non seulement celles appelées “melk”, mais aussi les terres collectives. Il est important de noter qu’avant la colonisation, des accords avaient été conclus pour faciliter le transfert de terres aux Européens. Il serait plus approprié de parler de “dépeçage” dans ce contexte.

En effet, des acquisitions de terres avaient déjà eu lieu dans le Nord-Ouest du Maroc grâce à la procédure de “protection” établie par la Convention de Madrid du 3 juillet 1880 et l’Acte d’Algésiras du 7 avril 1906, imposés par les puissances européennes. Par conséquent, au moment de l’établissement du protectorat, certaines terres étaient déjà entre les mains d’acquéreurs européens, ce qui explique également une activité intense dans ce domaine normatif afin de garantir des droits aux colons venant d’arriver.

Le dahir du 27 avril 1919 est toujours en vigueur aujourd’hui, il précise ainsi que « la propriété des terres collectives ne peut être acquise que par l’État et cette acquisition ne peut avoir lieu qu’en vue de créer des périmètres de colonisation». D’autre part, le dahir reconnaît la propriété de ces terres aux seules collectivités ethniques ayant la personnalité morale et consacre le caractère inaliénable, insaisissable et imprescriptible des terres collectives.

B. La garantie de la propriété privée avec la procédure d’immatriculation

Le système d’immatriculation foncière implique d’attribuer à chaque bien immobilier une sorte de “certificat d’identité” en enregistrant toutes les transactions juridiques affectant sa situation dans un registre tenu par un fonctionnaire public. La décision d’immatriculation conduit à la création d’un titre foncier, effaçant tout droit antérieur non mentionné dans ce document.

Les conséquences de ce modèle En outre, cette décision a un double effet : d’une part, elle modifie la juridiction compétente et la législation applicable, en faisant passer l’immeuble immatriculé sous la compétence des nouveaux tribunaux créés à cet effet, et en soumettant la propriété foncière aux dispositions du code foncier de 1915, qui est en grande partie basé sur le droit français.

La finalité de la procédure d’immatriculation

Sous le régime du Protectorat, les autorités ont mis en place une procédure d’immatriculation dans le but de garantir la propriété privée, principalement au profit des acheteurs étrangers. Le Dahir du 12 août 1913 a instauré au Maroc un système d’immatriculation facultatif des biens immobiliers en les enregistrant dans un registre foncier. Cette procédure administrative est supervisée par le conservateur foncier, responsable de la rédaction des titres de propriété et de leur inscription dans les registres fonciers. Il convient de noter que cette démarche n’était pas conçue pour protéger les intérêts des Marocains.

L’influence majeure de l’acte de Torrens L’Acte Torrens australien a établi la suprématie des registres fonciers, lesquels seuls établissent et officialisent les droits de propriété et tout autre droit réel sur un bien immobilier donné. Le système d’immatriculation foncière s’inscrit dans le cadre de la politique de développement territorial menée par l’Administration coloniale. L’Acte Torrens de 1858, mis en place en Australie, a instauré un système de “création administrative” de la propriété privée foncière. Il visait à la fois à éliminer les droits coutumiers fonciers et à établir un registre officiel des terres, appelé “registre foncier”, équivalent à un “état civil” pour les biens fonciers. En vertu de la théorie du domaine éminent, l’État a acquis les terres conquises, ce qui a entraîné une extension du “makhzen” et la reprise sous sa juridiction des terres tribale ainsi que des terres affectées à des fins publiques.

Les terres du makhzen Le législateur français a élargi la sphère du “makhzen”, introduisant une distinction entre le domaine public et le domaine privé de l’État.

Le régime foncier marocain repose sur cette triple assisse: Droit musulman, droit coutumier et droit dit moderne provenant du Protectorat. Cette superposition de régime rend le droit foncier particulièrement difficile à comprendre.

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Cours de droit foncier : Les modes d'accès au domaine foncier

Franck-Willy

DEUXIÈME PARTIE : L’ACCÈS A LA TERRE

Titre i : les modes d’accès au domaine foncier, chapitre i : la propriété foncière, soction 1- l’appropriation des terres rurales, sous-section 1- la propriété foncière immatriculée, paragraphe 1- le système de l’immatriculation , paragraphe 2- conditions et modalités de l’immatriculation, paragraphe 3- les effets de l’immatriculation, sous-section 2- la propriété foncière certifiée, paragraphe 1- fondement et nature de la propriété foncière coutumière, paragraphe 2 - portée et limites de la reconnaissance de la propriété foncière coutumière, section 2 : l’appropriation des terrains urbains, paragraphe 1- l’appropriation des terrains urbains par l’etat et ses démembrements, paragraphe 2- l’appropriation des terrains urbains par les particuliers, chapitre 2 : le droit d’usage de la terre, section 1 : le bail emphytéotique, paragraphe 1- les caractéristiques du bail emphytéotique, paragraphe 2- les motifs d’utilisation du bail emphytéotique, section 2 : les autres locations foncières, paragraphe 1 - les terres appartenant à l’etat , paragraphe 2- les terres appartenant aux particuliers, chapitre 3 - les obligations liées a l’accès a la terre, section 1- l’obligation de mise en valeur, sous-section 1- la notion de mise en valeur, paragraphe 1- fondement et portée de l’obligation de mise en valeur, paragraphe 2- les critères de la mise en valeur, sous-section 2- mise en valeur et prérogatives foncières, paragraphe 1- mise en valeur et propriété foncière, paragraphe 2- mise en valeur et droit d’usage de la terre, section 2- la fiscalité foncier, paragraphe 1 : la fiscalité foncière urbaine, paragraphe 2 : la fiscalité foncière rurale, titre ii : les transmissions des droits fonciers, chapitre i : les transmissions entre vifs ou cessions des terres, session 1- les cessions volontaires des terres, paragraphe 1- la cession des terres appropriées, paragraphe 2- la cession des terres non appropriées , section 2- les cessions forcées l’expropriation pour cause d’utilité publique, paragraphe 1- domaine de l’expropriation, paragraphe 2- la procédure d’expropriation, chapitre 2- la succession des terres, section 1- les droits transmissibles sur les terres, paragraphe 1- les droits de propriété foncière transmis, paragraphe 2- de la transmissibilité des droits d’usage, section 2- les personnes successibles, paragraphe 1- les règles générales, paragraphe 2- les particularités successorales en milieu rural.

  • Introduction ;
  • Première partie (la gestion du patrimoine foncier)

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Franck-Willy

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Plançon, Caroline. "La représentation dans la production et l'application du droit. Etudes de cas dans le droit de propriété foncière au Canada/Québec, en France et au Sénégal." Phd thesis, Université Panthéon-Sorbonne - Paris I, 2006. http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00189910.

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Dinh, Luong Minh Anh. "L'État et la propriété foncière au Vietnam." Thesis, Université Grenoble Alpes (ComUE), 2019. http://www.theses.fr/2019GREAD001/document.

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